Hypercholestérolémies : la troisième révolution thérapeutique

L'importance des hypercholestérolémies en tant que facteur de risque vasculaire a émergé au cours des années 50 avec les premiers résultats de la Framingham Heart Study. La première révolution thérapeutique a été représentée dans les années 60 par les fibrates et les résines qui ont été longtemps les seuls médicaments susceptibles de diminuer de façon nette le cholestérol plasmatique. Mais il a fallu attendre les années 80 pour assister à l'émergence de produits plus puissants, les statines qui ont clairement démontré l'intérêt clinique d'un tel effet, purement biologique au départ, et plus tard en termes plus concrets de morbidité et de mortalité cardio-vasculaires. Pour Jean-Charles Fruchart, de l'Institut Pasteur de Lille, qui présidait un symposium consacré à la prise en charge des hypercholestérolémies, nous sommes à l'aube d'une troisième révolution thérapeutique avec la naissance d'une nouvelle classe d'hypocholestérolémiants, les inhibiteurs de l'absorption du cholestérol.

Nous sommes en effet aujourd'hui confrontés à une situation paradoxale. Alors que le LDL-cholestérol est clairement désigné comme l'adversaire principal par les grandes études épidémiologiques, comme la Framingham Heart Study aux USA et l'étude PROCAM en Europe, alors que nous disposons de produits puissants pour le combattre, en l'occurrence les statines, la prise en charge des hypercholestérolémies est encore très insuffisante en pratique.

Ainsi, toutes les enquêtes conduites sur le terrain, comme EUROASPIRE I et II, montrent qu'un pourcentage encore très élevé de patients ne sont pas traités . En outre, parmi les sujets qui le sont, seul un sur deux parvient aux objectifs fixés par les sociétés savantes en termes de LDL-C.

Les causes de cet échec relatif sont évidemment multiples, mais pour J-C Fruchart, il convient à côté des insuffisances du dépistage, d'insister sur les limites actuelles des statines. Certaines tiennent à la tolérance de ces molécules qui sont susceptibles, on le sait, d'entraîner des atteintes musculaires imposant l'arrêt de la thérapeutique. D'autres, moins connues des praticiens, sont liées à la courbe dose réponse relativement plate de ces médicaments résumée par la règle des 6. En effet, quelque soit la statine considérée, le doublement de la posologie initiale, ne permet qu'une diminution supplémentaire de 6 % environ du LDL-C, ce qui revient à dire que la multiplication (par étapes) par 8 de la dose initiale de statine (de 10 à 80 mg) ne permet d'obtenir qu'une baisse supplémentaire du LDL-C d'environ 18% environ.
C'est pour toutes ces raisons que la mise à disposition prochaine aux praticiens d'une nouvelle classe d'hypocholestérolémiants, les inhibiteurs sélectifs de l'absorption du cholestérol constituera un progrès décisif. Cette nouvelle famille de médicaments, dont le chef de file est l'ezetimibe, agit en effet par un mécanisme complémentaire de celui des statines. Alors que celles-ci diminuent la synthèse endogène du cholestérol, l'ezetimibe inhibe sélectivement l'absorption intestinale du cholestérol alimentaire et biliaire.


Au cours des études cliniques, en monothérapie, l'ezetimibe à la dose de 10 mg par jour entraîne une baisse moyenne de 17 % du LDL-C. Son intérêt est majeur en co-administration avec une statine. Dans ce cadre, ezetimibe associé à n'importe qu'elle statine permet une baisse supplémentaire moyenne de 18 à 21 % du LDL-C, une efficacité du même ordre que celle atteinte avec trois doublements successifs de la dose de la statine.

Selon J-C Fruchart, l'intérêt de l'ezetimibe dans la prise en charge des hypercholestérolémies devrait être renforcé au cours des prochaines années par les nouvelles recommandations que prépare la Société Internationale d'Athérosclérose. Celles-ci fixeront en effet comme objectif en prévention secondaire un taux de LDL-C inférieur à 100 mg/dl (un gramme/L), seuil que l'on sait difficile à atteindre en pratique avec une statine en monothérapie.

Dr Gilles Haroche


Fruchart J-C : " Evolving spectrum of cholesterol management." Symposium satellite. Cholesterol absorption inhibitors: shaping the future of lipid management. 6ème ECE, Lyon, 26-30 avril 2003. © Copyright 2003 http://www.jim.fr

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