Comme pour d'autres hypoglycémiants, on s'est demandé si les incrétines GLP-1 (analogues du glucagon-like peptide-1) et les DPP-4 (inhibiteurs de la dipeptidylpeptidase-4) pouvaient augmenter le risque de cancer du pancréas. Des auteurs se sont penchés à nouveau sur cette question avec une étude internationale multicentrique réalisée avec le soutien de la Fondation danoise pour la recherche épidémiologique.
Cet essai a été réalisé à partir des registres médicaux de population, dont les données ont été relevées par les centre hospitalo-universitaires d'Aarhus (Danemark), Leiden, (Pays-Bas), Londres (Royaume-Uni) et Bologne (Italie). Il s'agit d'une étude cas-contrôle avec appariement sur l'âge, le sexe et le lieu de vie (1/10) des patients suivis dans ces CHU entre 2005 et 2012 ; 6 036 cas de cancer pancréatique et 60 360 témoins ont été inclus.
Dans cette étude, 20,8 % des cas de cancer pancréatique avaient reçu un traitement hypoglycémiant, contre 8,6 % des contrôles exempts de ce cancer. 2,0 % des patients atteints de cancer du pancréas avaient pris au moins une fois un traitement comportant des incrétines, contre 0,7 % des sujets contrôles.
Par rapports aux contrôles, les patients atteints de cancer du pancréas avaient plus d'antécédents d'hospitalisation pour pancréatite chronique (3,6 % vs. 0,3 %), lithiases (10,7 % vs 5,3%), obésité (4,0 % vs 2,9%), alcoolisme (6,5 % vs 3,9 %) et pneumopathies chroniques (21,2 % vs 17,9 %).
Par rapport aux patient non traités par hypoglycémiants, le risque ajusté de cancer pancréatique était plus élevé chez les ceux qui en avaient pris : anti-DPP-4 (ORa [odds ratio ajusté] = 3,87 ; intervalle de confiance à 95 % de 3,06 à 4,89), analogues du GLP-1 (ORa = 2,70 ; IC95 de 1,82 à 4,00), metformine (2,65 ; IC95 de 2,44 à 2,88), sulfamides (2,65 ; IC95 de 2,41 à 2,91) ou insuline (3,61 ; IC95 de 3,24 à 4,03).
Les OR de cancer les plus élevés ont été observés chez les patients qui débutaient un traitement hypoglycémiant et chez ceux à qui on avait prescrit moins de 3 de ces médicaments ; ceci suggère l'absence de relation causale ou une association causale inverse. Si le risque de cancer du pancréas augmente de manière similaire avec tous les agents hypoglycémiants, le diabète est en soi un facteur de risque de cancer pancréatique indépendant.
Véronique Canac