Vers la rémission ?
Avant de parler de rémission au sens strict, il est intéressant d’apprécier le devenir de ces patients lorsque le traitement antirétroviral est arrêté. Plusieurs études ont été développées dans ce sens. Elles ne concernent encore que des populations limitées (8 à 27 participants pour les 4 études évoquées), mais elles montrent toutes un rebond de la charge virale après une vingtaine de jours d’arrêt en moyenne. Ce rebond de la charge virale ne se traduit cependant pas par un syndrome rétroviral aigu ni par une chute des CD4 ou le développement de résistance. De plus, tous répondent lorsque le traitement est réintroduit.Ces études ont montré également que l’on retrouve des séquences similaires entre l’infection aiguë et la phase de rebond suggérant l’absence de réplication virale durant le traitement antirétroviral avec possible expansion clonale des cellules latentes infectées mais sans augmentation du réservoir ni émergence de mutations. Enfin, on a pu constater une augmentation du nombre de cellules T CD8+ spécifiques au VIH après l’interruption, une constatation qui a remis la question du vaccin au centre de l’actualité. Administré avec le traitement antirétroviral, son potentiel en rémission est pour l’instant étudié dans une étude portant sur 18 patients vaccinés versus 9 sous placebo et dont les résultats sont attendus pour 2019. Les experts attendent beaucoup de cette stratégie, notamment parce qu’on a déjà pu constater une forte immunogénicité avec les traitements par cellules dendritiques.
Quoi qu’il en soit, ces études ont montré que la chute de charge virale n’est pas suffisante pour empêcher le rebond et que l’immunité n’est pas suffisante ou enclenchée trop tard.
Que nous réserve le futur ?
De nombreux experts pensent que le délai avant rebond de la charge virale n’est pas le meilleur critère d’évaluation, mais il est actuellement le seul accessible aisément. De plus la durée fixe du traitement suivant une infection aiguë (24 semaines) pourrait être modifiée, soit en augmentant cette durée, soit en la réduisant mais en associant d’autres traitements, soit en modulant la durée en fonction des marqueurs virologiques. Dans ce sens, il pourrait être intéressant de combiner au cours de la phase aiguë des anticorps monoclonaux comme le vedolizumab qui agit en bloquant l'intégrine α4-β7, une molécule-clé permettant l'acheminement de cellules de l'immunité. L’association aux LRA (Lipid Removal Agent) ou aux DART (anticorps à double activité reciblant) est une autre option en cours d’investigation.Après arrêt du traitement antirétroviral, la recherche se focalise pour l’instant sur l’immunothérapie par cellules dendritiques, les vaccins thérapeutiques ou encore la combinaison d’un vaccin avec un LRA ou un DART.
Dr Dominique-Jean Bouilliez