Insuffisance rénale chronique, mieux vaut programmer sa chirurgie

Les patients atteints d’une insuffisance rénale chronique (IRC) sont particulièrement exposés aux actes chirurgicaux majeurs si l’on se réfère aux sujets dont la fonction rénale est normale. L’IRC un tant soit peu sévère prédispose à l’athérosclérose volontiers plurifocale et s’accompagne souvent de comorbidités qui viennent encore assombrir le pronostic. Cette chirurgie est-elle pour autant plus risquée à court terme dans un tel contexte ? Rares sont les études qui permettent de répondre à cette question.

Une étude canadienne rétrospective

Une étude canadienne rétrospective a porté sur les données administratives, cliniques et biologiques de patients adultes atteints d’une IRC sévère qui ont tous été hospitalisés en vue d’une chirurgie majeure non cardiaque entre avril 2005 et février 2017. La sévérité de l’IRC était attestée par la nécessité d’une hémodialyse chronique ou par la constatation à au moins deux reprises d’un débit de filtration glomérulaire estimé (DFG e) <15 ml/min/1,73m2). La mortalité et le risque d’infarctus du myocarde dans les 30 jours qui ont suivi l’intervention ont été estimés en fonction de la nature de cette dernière et pris en compte dans une analyse mutivariée par régression logistique qui a intégré les variables suivantes : données démographiques, comorbidités, bilan biologique préopératoire, procédure urgente ou non et particularités de la maladie rénale.

Le risque de décès ou d’IDM est majoré en cas de neurochirurgie, de chirurgie anorectale ou rétropéritonéale

Au total, ont été inclus 3 398 patients le plus souvent en hémodialyse chronique (n=1 905 ; 56,0 %) ou en dialyse péritonéale (n=590 ; 17,4 %).  Ces mesures d’épuration extrarénales ne s’imposaient chez les autres participants en dépit de la sévérité de l’IRC (n=903 ; 26,6 %). Plus d’une fois sur deux (56,9 %), l’intervention chirurgicale relevait de l’urgence et les patients concernés étaient le plus souvent de sexe masculin (61,0 %), l’âge médian étant estimé à 61,5 ans (écart interquartile, 50,0, 72,7).

Dans les 30 jours qui ont suivi l’acte chirurgical, 198 patients (5,8 % sont décédés ou ont été victimes d’un IDM. La fréquence de cette éventualité s’est avérée la plus faible (0,7 %) en cas de transplantation rénale) et la plus élevée en cas d’intervention neurochirurgicale (33,3 %), loin devant la chirurgie anorectale (11,8 %) ou encore rétropéritonéale (10,0 %). Pour ce qui est des autres actes chirurgicaux, sa fréquence a été comprise entre 3,5 % (ORL) et 9,9 % (chirurgie orthopédique), tout en étant élevée (voisine de 9 %) quant à la chirurgie abdominale, orthopédique, vasculaire ou encore dermatologique.

Le risque post-opératoire à court terme (30 jours) -estimé ici à partir du nombre de décès et d’IDM) - chez les patients atteints d’une IRC sévère, le plus souvent en hémodialyse chronique ou en dialyse péritonéale, apparaît élevé mais tributaire de la nature de l’intervention chirurgicale non cardiologique. Il est faible en cas de transplantation rénale programmée mais important dans la plupart des autres interventions qui relèvent souvent de l’urgence et de ses aléas. L’amélioration de ces chiffres repose sur une prise en charge péri-opératoire personnalisée et optimisée qui doit prendre en compte toutes les dimensions de l’IRC sévère ou terminale ce qui n’est pas une mince affaire.

Dr Philippe Tellier

Référence
Harrison T et coll. Mortality and cardiovascular events in adults with kidney failure after major non-cardiac surgery : a population-based cohort study. Congrès international de néphrologie. Du 15-19 avril 2021 (virtuel).

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