Si les cardiologues recherchent de plus en plus fréquemment une atteinte des carotides ou des artères périphériques en cas de coronaropathie, les artères rénales sont malheureusement trop souvent oubliées dans le bilan cardio-vasculaire. Il est vrai qu’il n’est pas aisé de suspecter une sténose de l’artère rénale vu la faible spécificité des symptômes (qui vont de l’hypertension artérielle à l’insuffisance rénale en passant par l’insuffisance cardiaque ou coronaire et l’hypertrophie ventriculaire par des mécanismes neurohormonaux). Ce qui explique par ailleurs qu’on n’en connaisse que fort imparfaitement l’incidence de cette complication. Il n’en fallait pas plus pour que R. Ollivier et son équipe du CHU Pontchaillou de Rennes, assistée d’une équipe genevoise ne tente de déterminer la prévalence de la sténose de l’artère rénale dans une population à risque, à savoir les coronariens.
Premier constat : pour mener à bien cette étude, il a fallu batailler aux confins de plusieurs spécialités : cardiologie, néphrologie, chirurgie vasculaire, radiologie, médecine vasculaire, …. Pour y remédier, R. Ollivier a dès lors programmé, pendant 24 mois, une artériographie de l’artère rénale dans le même temps qu’une coronarographie auprès de 651 patients consécutifs avec coronaropathie avérée.
Cet examen systématique a permis de relever chez 94 patients (14,5 %) une sténose significative de l’artère rénale (>50 %), 20 d’entre eux (3,1 %) ayant une atteinte des deux artères rénales. Les auteurs ont identifié ensuite plusieurs facteurs de risque : la présence d’une artériopathie périphérique (p<0,001), un âge >70 ans (p<0,05), le nombre des lésions coronaires (p<0,001), une hypertension artérielle (p=0,01) et une clairance à la créatinine <60 ml/min (p<0,001).
En analyse multivariée, ce sont le sexe masculin (p<0,05), le nombre de lésions coronaires (p<0,01), l’hypertension artérielle (p=0,01) et l’insuffisance rénale (p<0,001) qui sont les plus prédictifs d’une sténose de l’artère rénale.
Relevons également que parmi les patients ayant deux ou trois territoire(s) coronarien(s) atteint(s), respectivement un sur 6 (16,2 %) et un sur 4 (24,3 %) avaient une atteinte rénale (cf figure) et que parmi ceux ayant une artérite périphérique, 1 sur 2 avait une sténose de l’artère rénale
Quant au traitement de la sténose rénale, s’il peut être souvent médical (au même titre qu’en cas d’atteinte coronaire), il ne faut oublier pour autant les bénéfices que pourrait apporter la pose d’un stent.
Dr Dominique-Jean Bouilliez