
Les insulinomes sont des tumeurs pancréatiques rares, sécrétantes, le plus souvent de petite taille au moment du diagnostic. Le traitement de référence est chirurgical, par énucléation dans la moitié des cas. La morbidité chirurgicale est toutefois élevée, quelle que soit la méthode.
Une alternative thérapeutique se développe depuis quelques années. Il s’agit de la destruction par radiofréquence (RF) réalisée sous écho-endoscopie. Les résultats obtenus jusqu’à présent sont satisfaisants (87 % de destruction dans une étude rétrospective française récente (1), au prix d’une morbidité qui reste limitée.
Comparer la chirurgie et la radiofréquence
Au cours des JFHOD qui viennent de se tenir à Paris, Bertrand Napoléon a présenté les résultats d’une étude rétrospective multicentrique internationale, dont l’objectif principal était de comparer la morbi-mortalité de la RF et celle de la chirurgie, pour le traitement des insulinomes pancréatiques.
Une analyse de données recueillies prospectivement dans 23 centres experts a été réalisée. Elle porte sur 304 patients, traités entre 2014 et 2022 par chirurgie ou par RF pour un insulinome. Le critère principal était le taux de complications à 3 mois. Les patients étaient majoritairement des femmes (64,2 %), 111 ont été traités par RF et 193 par chirurgie. A l’inclusion, l’âge et l’index de comorbidités étaient plus élevés dans le groupe RF, alors que le groupe chirurgie comprenait plus de lésions corporéo-caudales et la taille et le grade de la tumeur étaient supérieurs. Après appariement en fonction de ces facteurs, les données de 178 patients ont finalement été analysées (89 traités par RF, 89 par chirurgie).
Des complications moins nombreuses et moins sévères
Au total, 55 patients du groupe chirurgie (62 %) ont présenté des complications. Il s’agit des complications classiques, principalement des fistules pancréatiques, qui ont nécessité une intervention radiologique, endoscopique ou chirurgicale dans 15 % des cas. Leur sévérité est régulièrement répartie entre grades I, II, III.
Dans l’autre groupe, les complications ont été moins nombreuses (n= 15, 17 %) et ont pu être gérées médicalement. Il s’agit principalement de pancréatites aigües, de douleurs abdominales ou d’hématome splénique. Aucune complication de grade III n’est survenue. Aucun décès n’est rapporté dans les deux groupes. En analyse multivariée, le seul facteur favorisant la survenue d’une complication est la chirurgie (OR 7,38 ; 95 % CI 3,7 à 14,7).
En ce qui concerne les critères secondaires, la durée d’hospitalisation est plus courte dans le groupe RF (3,4 jours vs 11,1 jours), la durée de suivi est significativement inférieure (médiane 23 mois vs 37 mois) et, à la fin du suivi, l’efficacité clinique persistait chez 95,5 % des patients traités par RF et 100 % des patients traités par chirurgie. Dans le groupe RF, 15 patients ont récidivé, 12 dès la première année après le traitement. Parmi eux, 11 ont été traités à nouveau par RF, sans nouvelle récidive, et 4 ont été opérés sans complication. Il a été noté que la persistance d’un résidu tumoral vascularisé est un facteur de risque de récidive (53,3 % de récidives vs 6,8 % chez les patients avec réponse clinique stable).
Une étude prospective internationale devrait débuter pour confirmer les résultats à long terme de la radiofréquence. B. Napoléon signale par ailleurs qu’en France, une cohorte longitudinale prospective de suivi des patients traités par RF (toutes indications) a été mise en place sous l’égide du CFP (Club Français du pancréas) et de la SFED (Société Française d’Endoscopie Digestive).
(1) : Etude Rafpan 1- JFHOD 2022 – En cours de révision GIE 2023
Dr Roseline Péluchon