
Il n’y a pas si longtemps, on considérait que le tissu adipeux était un tissu de soutien des autres organes, une sorte de « bouche trou » destiné au stockage des graisses et empêchant la déperdition de chaleur. Mais avec la découverte d’une synthèse et d’une sécrétion de Tumor Necrosis Factor (TNF) au niveau des adipocytes puis l’identification de la leptine, respectivement en 1993 et 1995, une nouvelle ère s’est ouverte. Il est apparu de plus en plus évident que le tissu adipeux exerce de multiples fonctions immunitaires et endocrines par le biais de nombreuses hormones et protéines, appelées adipocytokines ou adipokines.
Ce qui ne manque pas d’intéresser le rhumatologue, c’est l’implication de l’adipocyte dans le processus inflammatoire. Cette cellule n’est pas seulement capable de sécréter des médiateurs pro-inflammatoires, elle peut aussi répondre à un signal pro-inflammatoire par l’expression d’une grande variété de récepteurs pour les cytokines, les chémokines, les facteurs du complément et les facteurs de croissance.
Ainsi le tissu adipeux péri-articulaire, synovial, sous cutané et même les adipocytes intra-médullaires de l’os sont-ils susceptibles de jouer un rôle dans les pathologies rhumatismales.
Par exemple dans la polyarthrite rhumatoïde (PR), on note que la production d’adipokines est augmentée dans le tissu graisseux péri-articulaire (mais aussi ailleurs) sans pouvoir encore complètement en préciser les conséquences biologiques. L’adiponectine, qui est l’adipokine dont la concentration dans le sérum et le liquide synovial est la plus élevée, est exprimée par les adipocytes bien sûr mais aussi par d’autre types de cellules telles les ostéoblastes et les cellules du tissu synovial dont les fibroblastes synoviaux de PR (ou RASF pour Rheumatoïd Arthritis Synovial Fibroblast). Or l’adiponectine influence significativement le profil d’expression des gènes et protéines dans les RASF, les lymphocytes, les chondrocytes et les cellules endothéliales. Il est probable qu’elle est un promoteur de l’inflammation et de la destruction matricielle dans la PR.
Les adipokines (adiponectine, résistine, leptine, vifastine…) et les autres cytokines produites par les adipocytes (TNF, IL6, facteurs du complément, facteurs de croissance, molécules d’adhésion…) apparaissent toutes impliquées dans la physiopathologie de l’inflammation articulaire et jouent certainement un grand rôle dans la physiopathologie de la PR.
Dr Marie-Line Barbet