De la grossesse
Les femmes enceintes pourraient probablement bénéficier d’une
approche globale associant une évaluation médicale, psychosociale
et environnementale dès le début de la grossesse. Un soutien
approprié aux femmes enceintes pourrait permettre un meilleur vécu
de la grossesse et possiblement une réduction des complications
néonatales et postnatales. Mais on est encore loin du compte si
l’on en croit Gisèle Apter (Le Havre) qui constate que la santé
mentale des femmes dans le peripartum est encore très secondaire
aux yeux des autorités de santé alors que l’on sait que le risque
d’affections psychiatriques est très élevé chez les enfants et
adolescents nés d’une mère avec maladie psychiatrique durant la
grossesse. Pire, les études ont également montré ce risque en cas
de traumatisme ou de stress au moment de la naissance. « Il y a
donc lieu de changer les mentalités » conclut-elle (1). Parmi
celles-ci, la notion de conflit materno-fœtal qui laisse supposer
que les mères refuseraient certains traitements durant la grossesse
et ne tiendraient pas compte de la santé du fœtus en particulier en
cas d’abus de drogue ou d’addiction voire lorsqu’elles présentent
un état-limite. « Il serait bon que l’on se pose la question
dans ce contexte de la motivation et des possibilités des femmes à
prendre en charge cette addiction » signale Gail Robinson
(Canada).
Dans le registre des conflits materno-fœtal a été évoquée la
situation extrême que l’on ne peut contraindre une femme enceinte à
donner son rein pour son fœtus car elle y perdrait son droit à
l’autonomie et sa liberté de choix. « La grossesse est souvent
la fin de la liberté reproductive » pour Gail Robinson « et
nous ne pouvons en tant que psychiatre ignorer ce fait et être
coercitif » (2).
A la vie de tous les jours
Dans un autre ordre d’idée, Jair Mari (Sao Paulo, Brésil)
rappelait que si l’incidence de la dépression augmente fortement au
moment de l’adolescence entre 12 et 17 ans, les filles y sont plus
exposées que les garçons (8,1 % contre 3,3 %) alors que l’incidence
est identique (1,8 % et 2,1 %) entre 6 et 12 ans. Si l’on ne peut
éviter d’évoquer des facteurs génétiques pour expliquer ce fait, il
ne faut pas oublier le rôle de facteurs environnementaux – et donc
la possibilité de faire une bonne prévention, souligne-t-elle (3).
Et pour ce faire, il faut se plonger dans le quotidien de la
femme.
Être une super-femme est fatigant… De plus, les femmes sont
plus faiblement syndiquées (‘défendues’) que les hommes et occupent
plus souvent des emplois plafonnés dans ce qu'on appelle maintenant
des « ghettos féminins » et dont les emplois de secrétariat
sont l'exemple le plus clair. Il est facile de voir que les emplois
réservés aux femmes sur le marché du travail impliquent la
transposition des qualités et des comportements traditionnellement
attendus de la part des femmes. Et comme les femmes exercent
gratuitement au foyer des tâches comparables à celles qu'elles
exercent sur le marché de l'emploi, la tentation est grande de
sous-évaluer et de sous-rémunérer les emplois dits «
féminins ».
Dr Dominique-Jean Bouilliez