Paris, 11 janvier 2007. Le professeur Philippe Reinert, pédiatre spécialisé en pathologie infectieuse de l’enfant, a présenté au cours de la dernière réunion de la Société française de dermatologie une revue des aspects actuels de la varicelle. Il a ainsi rappelé qu’il s’agissait d’une des plus fréquentes fièvres éruptives et que l’on estimait le nombre de nouveaux cas en France à 5 à 700 000 par an.
Classiquement bénigne, on constate, en fait, que le taux
de complication se situe aux alentours de 30 % des cas observés. Il
s’agit souvent de complications cutanées mais également de
complications neurologiques et pulmonaires. Les complications
cutanées sont dominées par les surinfections à streptocoques du
groupe A à type de dermohypodermite d’évolution le plus souvent
simple, d’abcès sous cutanés et ces manifestations dermatologiques
pourraient être malgré tout favorisées par l’utilisation de
certains talcs antiseptiques dont l’intérêt réel est probablement
marginal au regard des effets secondaires qu’ils semblent
engendrer.
La mortalité de la varicelle reste non négligeable puisqu’une enquête rétrospective conduite entre 1979 et 2000 en France a permis de lui attribuer 428 décès dont plus de 60 % étaient observés chez des enfants de moins de 15 ans et 34 % chez des enfants de moins de 10 ans.
Sa sévérité potentielle est d’autant plus importante lorsqu’elle survient au cours de déficits immunitaires. Les déficits immunitaires en cause sont exclusivement des déficits immunitaires cellulaires et ceci explique la gravité de la varicelle au cours des leucémies et des cancers traités, au décours de transplantation d’organes ou chez des enfants recevant des traitements immunosuppresseurs lourds. Le rôle aggravant de la corticothérapie générale est admis : on dit classiquement qu’une corticothérapie générale de plus d’1 mois expose au risque de varicelle grave mais il semblerait que des corticothérapies locales courtes de 3-4 jours puissent également être responsables de varicelles sévères. Au cours de ces varicelles sévères de l’enfant immunodéprimé, la mortalité était autrefois importante puisque évaluée à 20 % des cas. Depuis 1981, cette mortalité a chuté considérablement et c’est l’acyclovir par voie intraveineuse qui a permis d’améliorer le pronostic de ces varicelles de l’immunodéprimé. Il a été rappelé que la varicelle pouvait révéler une infection par le VIH et qu’il fallait d’autant plus y penser en cas de varicelles chroniques récidivantes dès l’arrêt de l’acyclovir. Enfin, la sévérité de la varicelle néonatale chez des enfants nés d’une mère qui a développé cette varicelle dans les 5 jours qui précédaient et dans les 2 jours qui suivaient l’accouchement a été soulignée.
Pour conclure, Philippe Reinert a traité de quelques thèmes
d’actualité en matière de varicelle :
On observe depuis 1990, une augmentation significative du nombre
d’hospitalisations annuelles pour varicelle puisque ce nombre était
d’environ 3000 par an dans les années 90 et qu’en 2000, il était de
l’ordre de 4000 hospitalisations. Ces hospitalisations sont liées à
la sévérité de certaines varicelles et particulièrement aux
surinfections streptococciques essentiellement cutanées.
Curieusement ces varicelles compliquées et sévères surviennent le
plus souvent chez des enfants sans autre pathologie (plus de
75 % des cas). Dans ces varicelles graves, le rôle de la
corticothérapie générale semble là encore prédominant, qu’elle soit
au long cours ou sur quelques jours. La sévérité des complications
cutanées de ces varicelles graves est dominée par le tableau de
cellulite nécrosante dont le pronostic fonctionnel peut être très
sévère (délabrement, amputation) et qui peut également mettre
en jeu le pronostic vital. Depuis plusieurs années, les pédiatres
français insistent sur le rôle favorisant des AINS dans ces
cellulites nécrosantes observées au cours de la varicelle mais les
données de la littérature sont extrêmement contradictoires,
certaines études confirmant le rôle aggravant des AINS et d’autres
non. Il est à noter que ce rôle délétère des AINS n’est absolument
pas reconnu aux Etats-Unis.
L’autre sujet d’actualité pour nos confrères pédiatres est la
vaccination contre la varicelle. Il s’agit d’un vaccin vivant
atténué dont l’utilisation est bien entendu décommandée au cours
des déficits immunitaires. Son efficacité est incontestable même si
elle semble s’atténuer au fil des années. Il existe par ailleurs un
doute sur le risque ultérieur de zona sévère chez les patients
vaccinés contre la varicelle.
Enfin, Philippe Reinert s’est interrogé sur les raisons de la
faible percée de la vaccination contre la varicelle en France alors
qu’elle est extrêmement répandue aux Etats-Unis ou dans certains
pays d’Asie. S’agit-il d’un particularisme culturel français ou
d’autres considérations qui ont trait au coût de la vaccination?
Les arguments sont beaucoup plus pragmatiques dans certains pays
comme la Corée du Sud où les indications de la vaccination reposent
essentiellement sur l’objectif de prévenir les cicatrices de
varicelle : ainsi seules les petites coréennes sont-elles
vaccinées !
Dr Patrice Plantin