La vitamine D : questions de pratique

Alors que de nombreux experts estiment qu’une consommation quotidienne d’au moins 1000 UI de vitamine D est nécessaire pour maintenir un taux de 25OH vitamine D (25OHD) supérieur à 20 ng/ml, les apports journaliers recommandés en France sont toujours de 200 UI/j et les apports nutritionnels conseillés de 400 UI/j au-dessous de 70 ans et 600 UI/j au-delà. Mais la consommation réelle est encore bien inférieure à ces recommandations, puisque les apports moyens seraient de 92 UI/j. Rien d’étonnant alors qu’une étude indiquait récemment que pour 80 % de la population française, le taux moyen de 25OH vitamine D (25OHD) est inférieur à 30 ng/ml, et pour presque la moitié, le taux est inférieur à 20 ng/ml.

Mais comment améliorer cet état de fait ? Les sources alimentaires de vitamine D ne sont pas très nombreuses (poissons gras, champignons, foie de veau principalement) et l’exposition au soleil est dépendante de la météo et limitée par les mises en garde des dermatologues. Reste le traitement médicamenteux, pour lequel il est toutefois nécessaire d’avoir à l’esprit quelques règles.

Peut-on parler d’un taux de vitamine D normal ?

Rappelons tout d’abord que si de nombreux travaux ont été consacrés récemment aux effets « non classiques » d’un déficit en vitamine D (risque de chute, cancer, évènements cardio-vasculaires, effets sur l’immunité, etc.), seul l’effet « classique » sur le risque de fractures non vertébrales et celui sur la prévention des chutes sont formellement prouvés. Rappelons aussi que, par consensus, le paramètre biologique qui définit le statut vitaminique D est le taux sérique de 25OHD. De plus, contrairement à la plupart des paramètres biologiques pour lesquels les seuils de références définissent l’intervalle dans lequel se retrouve 95 % de la population générale, les seuils retenus pour la vitamine D sont ceux au-dessus, et au-dessous desquels, il peut y avoir des conséquences délétères. Il est donc plus juste de parler de valeurs « souhaitables » ou « recommandées », plutôt que de valeurs « normales ».

Les taux recommandés sont variables selon les patients

En ce qui concerne la supplémentation, les recommandations font la différence entre les patients et la population générale. De nombreux experts considèrent ainsi que les patients présentant une maladie osseuse, rénale, ou encore un trouble phospho-calcique, peuvent être considérés en déficit quand leur taux de 25 OHD est < 20 ng/ml, et en insuffisance, avec un taux entre 20 et 30 ng/ml. En ce qui concerne une population générale d’individus en bonne santé, une concentration de 20 ng/ml serait suffisante.

Les niveaux de preuves pour l’élaboration de ces recommandations sont toutefois difficiles à obtenir, et il n’est pas recommandé de doser la 25OHD sans discrimination chez tous les patients. Certains patients pourront toutefois en bénéficier. Ce sont ceux qui présentent un rachitisme ou une ostéomalacie, une ostéoporose ou un risque accru d’ostéoporose (traitements, malabsorption), une chirurgie bariatrique, une insuffisance rénale chronique, une hyperparathyroïdie primitive, une photodermatose, etc.).

Pas de recettes mais quelques pistes pour la supplémentation en vitamine D

En ce qui concerne la supplémentation elle-même, s’il n’existe pas de « recettes », quelques principes ne sont pas inutiles à connaître. Pour une meilleure observance, le choix du mode d’administration, journalière ou espacée, est fait en accord avec le patient, mais en cas de doses espacées (préférées dans la majorité des cas), il est préférable de donner de la vitamine D3 dont la demi-vie plus longue assure un taux vitaminique plus stable.

Pour des patients présentant une pathologie pour laquelle un taux supérieur à 30 ng/ml est préférable, un dosage de la 25 OHD préalable au traitement guidera le protocole. Le traitement consistera à rétablir d’abord un statut vitaminique correct : si la 25OHD  est < 20 ng/ml, on pourra par exemple initier le traitement par 4 ampoules de 100 000 UI de vitamine D3 à raison d’une toutes les 2 semaines. Si le taux de 25 OHD est entre 20 et 30 ng/ml, 2 ampoules de vitamine D3 espacées de 2 semaines. Il sera ensuite nécessaire de maintenir au long cours un statut satisfaisant, supérieur à 30 ng/ml, ce qui peut être obtenu par l’administration d’une ampoule de 100 000 UI de vitamine D3 tous les 2 à 3 mois, ou des doses journalières de 800 à 1200 UI. Le suivi des taux de 25 OHD permet d’ajuster le traitement.

Pour la population générale, il n’est pas recommandé de doser la 25 OHD. Les conseils alimentaires et d’exposition prudente au soleil pourront être renforcés par la prescription d’une ampoule de 100 000 UI de vitamine D3 en novembre et février. 

La limite supérieure acceptable de 25 OHD serait entre 60 et 80 ng/ml. Elle correspond aux taux qui sont retrouvés par exemple chez les Massaï de Tanzanie ou du Kenya, exposés toute l’année aux UVB. Leur taux moyen est de 46 ng/ml, allant de 25 à un maximum de 75 ng/ml, bien loin du taux de 150 ng/ml associée à une intoxication possible.

Dr Roseline Péluchon

Référence
Souberbielle JC : Actualités sur la Vitamine D. Dietecom (Paris) : 27-28 mars 2014.

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