Alors qu’il existe de plus en plus de recherches sur les effets immunomodulateurs et l’intérêt thérapeutique des cannabinoïdes, il existe peu d’essais contrôlés évaluant les effets du cannabis inhalé, notamment en raison de problèmes éthiques bien compréhensibles. D’où l’intérêt d’une étude prospective longitudinale menée pendant 5 ans au Nouveau-Mexique chez des patients ayant un lupus érythémateux systémique.
Parmi les 276 sujets enrôlés, 30,4 % fumaient de la marijuana et 69,5 % n’étaient pas consommateurs. Si les caractéristiques démographiques et du lupus étaient similaires dans les deux groupes, plusieurs différences ont été notées. Les fumeurs de cannabis étaient plus volontiers consommateurs d’analgésiques opioïdes (p = 0,008) alors que les scores de la douleur, l’indice d’activité de la maladie et le recours aux corticoïdes n’étaient pas plus élevés. Il y avait en outre une augmentation de 39 % des lupus neuropsychiatriques en cas de consommation de cannabis (p = 0,04) et un accroissement de 85 % des insuffisances rénales terminales nécessitant une dialyse (p < 0,006). En analyse multivariée, l’excès important d’insuffisances rénales terminales pouvait être totalement expliqué par un défaut d’observance. Globalement, la fréquence de non observance était de 3 % chez les patients ne prenant pas de cannabis contre 95 % chez les consommateurs (p < 0,001) !
Au total, la consommation de marijuana n’apparaît pas associée à une réduction de la douleur ni de la consommation de corticoïdes, chez les patients ayant un lupus systémique, mais s’accompagne en revanche d’une pléiade de complications et d’une observance désastreuse qui ne vont assurément pas dans le sens d’une action bénéfique du cannabis utilisé à visée médicale au cours du lupus érythémateux systémique.
Dr Patricia Thelliez