Le cocktail est explosif, et on sait pourquoi !

WCC – Barcelone. Si le nombre d’agents dopants est considérable, leur toxicité est multipliée par le fait qu’ils sont le plus souvent utilisés en cocktails. Il est ainsi parfois difficile de faire la part entre leurs effets directs, notamment sur le cœur, leurs effets indirects (par les pathologies sous-jacentes qu’ils induisent en usage chronique) ou les effets délétères spécifiques de l’exercice physique.

On peut cependant retenir de la présentation de François Carré (CHU Rennes) que la plupart des produits dopants ont un effet arythmogène intrinsèque, et que leur utilisation chronique est à l’origine de mécanismes arythmogènes qui peuvent provoquer au cours d’un exercice intense des arythmies ventriculaires ou supraventriculaires en ouvrant les circuits de ré-entrée. Mais l’usage aigu de certains produits peut également entraîner des arythmies mortelles chez les sujets ayant des anomalies cardiaques sous-jacentes, ou lorsque leurs effets s’associent à ceux de drogues consommées de manière chronique.

Enfin, et c’est important, l’exercice physique intense constitue, par lui-même, un environnement favorable aux arythmies. L’exercice physique intense provoque en effet une ischémie myocardique relative en augmentant la stimulation vagale sympathique et le taux des catécholamines circulantes. Il augmente également l’excitabilité neurophysiologique en modifiant l’équilibre électrolytique, et en créant un étirement des cellules musculaires. Enfin, on observe couramment un allongement du QRS chez les athlètes entraînés.

Si l’on se réfère à l’action délétère des agents dopants sur le cœur, il faut savoir qu’une hypertrophie ventriculaire pathologique peut survenir sous stéroïdes anabolisants, hormone de croissance, glucocorticoïdes ou cocaïne, tandis que la consommation d’anabolisants ou de cocaïne peut entraîner une fibrose myocardique ; des infarctus pouvant même être provoqués par ces deux substances ainsi que par les amphétamines et le clenbutérol. Toutes ces conditions favorisent le déclenchement d’une arythmie lors d’un effort moins intense, au même titre qu’un allongement de l’espace QT que l’on peut observer sous diurétiques, cocaïne, anabolisants et hormone de croissance.

Concernant les stéroïdes anabolisants, il faut savoir que le risque de décès prématuré est 4,6 fois plus élevé que chez les sportifs n’en consommant pas, une anomalie cardiaque sévère (athérosclérose coronarienne, fibrose myocardique, …) étant souvent présente à l’autopsie. Ce que les pharmacologues expliquent aisément par l’effet minéralocorticoïde des anabolisants, un effet qui mène à un oedème intracellulaire des cellules myocardiques, un gonflement des mitochondries et une désorganisation des myofibrilles. 

Pour la cocaïne, plusieurs actions délétères ont été largement documentées : une action sympathicomimétique (avec tachycardie, hyperexcitabilité cardiaque, hypertension), une vasoconstriction, une augmentation de l’agrégabilité plaquettaire et un effet toxique myocardique propre. Quant aux amphétamines, c’est par leur effet sympathicomimétique associé à un risque thrombotique et un vasospasme, qu’elles manifestent leur toxicité.

On imagine aisément le résultat catastrophique des cocktails, surtout lorsque des compléments alimentaires contenant de l’éphédrine viennent compléter le tableau…

Dr Dominique-Jean Bouilliez

Références
Carré F. : “ Pathophysiological substrate of arrhythmias in athletes using prohibiting drugs.” Symposium “Cardiovascular adverse effects of doping in sports”, World Congress of Cardiology (Bacelone, Espagne) : 2-6 septembre 2006.

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