Ces dernières années, le risque de suicide et de tentative de suicide a augmenté de manière très sensible. Parmi les pays de la Communauté Européenne, la Belgique occupe une place tristement privilégiée si l’on en croit les résultats d’une enquête effectuée par l’université de Liège (Belgique) à l’initiative de la mutuelle Solidaris. Ce « thermomètre » de la santé des Belges a permis par ailleurs à l’équipe du Pr William Pitchot d’obtenir des données intéressantes sur la prévalence de la dépression en se basant sur le PHQ9 (Patient Health Questionnaire-9), qui est un questionnaire à visée de dépistage, plutôt que réellement diagnostique, attribuant un score aux neuf critères du DSM sur une échelle de 0 [absent] à 3 [présent presque tous les jours]. Ils ont ainsi pu constater que « 5 % de la population souffrait au moment de l’évaluation d’un épisode dépressif qualifié de majeur et 11 % d’une dépression modérée ». Cette symptomatologie est dans la majorité des cas suffisante pour avoir un impact sur leur fonctionnement.
Mais ce sont les chiffres de suicidalité (idées, comportements suicidaires et suicide) qui ont le plus impressionné William Pitchot, avec notamment 12 % de la population qui atteste avoir déjà eu des idées suicidaires, tandis que la prévalence sur la vie de la tentative de suicide est de 8 %. Si l’on compare ces chiffres à ceux de l’étude ESEMeD qui avait montré en 2001 une prévalence de 3,2 % (2), on observe une augmentation sensible, reflet probable et inquiétant de la souffrance psychologique de la population et indirectement l’importance du désespoir face aux conditions économiques actuelles. Cette crise n’étant pas prête à se terminer, il faut s’attendre à une augmentation persistante du risque qui nécessitera une attention soutenue de la part des praticiens.
Dr Dominique-Jean Bouilliez
