La prévalence de la séropositivité VIH au Rwanda est effrayante, puisque sur 331 jeunes femmes hospitalisées à Kigali, 209 étaient infectées. Cette situation dramatique a permis l'approche épidémiologique d'un signe dermatologique connu (mais réputé exceptionnel) au cours du SIDA : le défrisage acquis des cheveux crépus.
Ce signe existait chez 30 des 209 patientes séropositives. Depuis quelques temps, leurs cheveux étaient devenus lisses, plus fins et plus fragiles. Ces patientes avaient également une perte de poids plus importante que les autres. Par contre, elles ne différaient pas du reste du groupe VIH+ par l'avancement de la maladie ou l'incidence des infections opportunistes.
A l'opposé, une seule patiente séronégative sur 122 était naturellement défrisée. La comparaison montre qu'une Rwandaise hospitalisée qui présente un défrisement acquis des cheveux a 30 chances sur 31 d'avoir le SIDA (valeur prédictive positive = 96,7%) et que la spécificité de ce signe dépasse 99%.
La valeur prédictive positive du décrépage spontané se montre donc supérieure ou comparable à celle de manifestations cutanéo-muqueuses comme l'herpès chronique, le zona, la candidose buccale ou le prurigo.
Elle est également légèrement meilleure que celle des symptômes cardinaux de la maladie tels que fièvre, diarrhée ou toux prolongées, perte de poids ou polyadénopathie.
Ce n'est pas la dénutrition qui est directement responsable de cette modification de la chevelure.
En effet si les malades ayant un défrisage acquis avaient plus souvent que les autres un amaigrissement dépassant 10 kilos, elles ne montraient pas d'autres signes de carence alimentaire ni d'alopécie ou de canitie comme on en observe dans le kwashiorkor.
Saraux : "Défrisage des cheveux au cours du Sida". Ann. Dermatol. Vénéréol., 1993 ; 120 : 385-396.
F.B.