Avec une femme enceinte séropositive sur 250 en région parisienne, l'infection par le VIH est en croissance exponentielle au cours de la grossesse.
Ce sont les zones urbaines qui payent encore le plus lourd tribut à l'infection par le VIH. C'est le cas notamment de l'agglomération parisienne qui rassemble 11 % de la population française et 46 % des cas de SIDA. Pour évaluer précisément la fréquence de l'infection parmi les femmes enceintes, le Centre européen de surveillance épidémiologique du SIDA a mené pendant quatre mois une enquête dans tous les centre hospitaliers publics et privés de Paris et des trois départements limitrophes. Outre son caractère exhaustif, cette étude a pour originalité d'avoir pris en compte aussi bien les patientes venues dans une maternité pour accoucher que celles hospitalisées pour une grossesse extra-utérine ou une fausse-couche, spontanée ou provoquée. Toutes les femmes ont été testées de manière anonyme. Les anticorps anti-VIH ont été recherchés sur le sang de la mère ou sur du sang provenant du cordon ou du placenta, par ELISA et Western-blot.
0,4 % des échantillons contaminés
La fréquence de la séropositivité a pu ainsi être évaluée chez 11 593 patientes, entre novembre 1990 et février 1991. Au total, 0,4 % des échantillons examinés contenaient des anticorps contre le VIH. Mais la séroprévalence était nettement plus élevée parmi les femmes venues pour un avortement provoqué (0,7 %) ou, surtout, une grossesse ectopique (1,96 %), que chez celles qui ont accouché (0,28 %). Le risque de grossesse extra-utérine étant corrélé à l'âge de la mère et aux antécédents de maladie sexuellement transmissible, on comprend facilement qu'il soit également associé à une fréquence accrue d'infection par le VIH. Cependant, le taux d'infection a été calculé à partir de deux cas sur 102 grossesses ectopiques, ce qui enlève toute fiabilité à l'analyse statistique. Chez les patientes ayant eu un avortement provoqué, la séroprévalence plus élevée peut être due à un risque accru d'infection aussi bien qu'à la décision plus fréquente d'interrompre la grossesse pour les femmes se sachant infectées.
Ainsi, on peut estimer qu'en région parisienne une femme enceinte sur 250 est séropositive et que dans un accouchement sur 360, la mère est infectée par le VIH. L'habituelle règle de trois permet de conclure que, dans Paris et sa banlieue, 300 enfants sont nés en 1991 d'une mère séropositive, ce qui correspond à 45 nouveau-nés infectés (1 sur 2 400), si l'on se fonde sur un taux de transmission périnatale de 15 %. Ce chiffre représente plus de la moitié des cas de SIDA néonataux déclarés entre 1983 et 1990 dans la même région et le tiers de ceux déclarés en 1990.
Chantal Guéniot
Couturier E. et coll. : "HIV infection at outcome of pregnancy in the Paris area, France". Lancet, 1992 ; 340 : 707-709.
GUENIOT CHANTAL