Les anti-TNF alpha en pratique

L’efficacité des anti-TNF alpha dans la prise en charge du psoriasis réfractaire aux thérapeutiques habituelles a été largement démontrée dans les nombreux essais cliniques qui ont conduit aux autorisations de mise sur le marché pour cette indication. L’heure est donc désormais à leur utilisation en pratique courante. Proposer cette alternative à un patient atteint de psoriasis en échec thérapeutique, initier le traitement et/ou en surveiller les résultats et la tolérance incombent ou incomberont donc désormais, un jour ou l’autre, à tout dermatologue.

Les circonstances et modalités de prescription et de suivi du traitement par étanercept ont été rappelées  au cours d’un symposium.

Les indications des anti-TNF alpha retenues pour l’AMM sont le psoriasis en plaque modéré à sévère de l’adulte atteignant plus de 30 % de la surface corporelle ou responsable d’un retentissement psychosocial important avec altération de la qualité de vie, n’ayant pas répondu à au moins 2 autres traitements systémiques (méthotrexate, ciclosporine, PUVAthérapie) ou en présence de contre indication à ces médicaments.

Les contre indications aux anti-TNF alpha sont l’existence de foyers infectieux chroniques, une tuberculose active, une insuffisance cardiaque au stade III/IV de la NYHA, une néoplasie (à l’exception des carcinomes baso-cellulaires cutanés et des cancers guéris depuis au moins 5 ans), enfin la grossesse et l’allaitement. 

Un bilan simple essentiellement clinique

Le bilan préthérapeutique doit donc s’attacher à dépister par l’interrogatoire et l’examen clinique un risque infectieux majoré (ulcère de jambe, antécédents de tuberculose, infections respiratoires récurrentes), une insuffisance cardiaque, une pathologie neurologique à type de SEP. Parmi les examens complémentaires, la réalisation d’une IDR (Tubertest  à 5 UI interprété sur la taille de l’induration) et d’un cliché thoracique est essentielle. Il est également utile de vérifier les sérologies des hépatites. Un bilan hépato-rénal, une NFS peuvent également être demandés.

La prescription initiale d’étanercept (Enbrel*) se fait obligatoirement à l’hôpital par un médecin spécialiste, selon les modalités réservées aux médicaments d’exception mais elle peut ensuite être renouvelé par le dermatologiste de ville. La posologie est au début de 50 mg, 2 fois par semaine, poursuivie pendant au maximum trois mois. Les injections sous cutanées sont faites au domicile (par le patient lui-même ou un proche). Le suivi est essentiellement clinique et aucune surveillance biologique systématique n’est requise.

La réponse au traitement doit être évaluée à trois mois. Si elle est favorable, la posologie est diminuée à 25 mg 2 fois par semaine pendant à nouveau trois mois. Le traitement doit être alors arrêté et ne sera repris que lors de la rechute, laquelle survient dans un délai de trois mois en médiane, à la dose de 25 mg 2 fois par semaine.

En cas d’absence de réponse à trois mois, le traitement doit être arrêté.

Une surveillance attentive

Les effets secondaires les plus fréquents sont les réactions au point d’injection qui concernent 15 à 20 % des patients. Fréquemment aussi, mais dans moins de 20 % des cas, apparaissent des anticorps anti-étanercept : ils ne sont pas neutralisants et n’obèrent pas l’efficacité du traitement. Parmi les effets indésirables rares, une tuberculose est observée chez moins de 1 sujet pour 1000. Encore ce taux est-il à interpréter en fonction de l’incidence de la tuberculose dans la population traitée. En ce qui concerne les infections cutanées et respiratoires, on note un taux un peu plus élevé de légionelloses.

Une SEP ou des névrites optiques sont constatées dans 0,01 à 0,1 % des cas.  Les autres effets secondaires rares sont l’aggravation d’une insuffisance cardiaque, les hépatopathies, les lupus induits cutanés purs ou systémiques.

Qu’en est-il enfin du risque carcinogène associé à ce type de traitement ? On sait que le psoriasis, comme la polyarthrite rhumatoïde, est associé à un risque accru de lymphome corrélé avec la sévérité de la maladie ainsi qu’à un risque plus élevé de cancers cutanés. Ces risques sont potentialisés en cas de PUVAthérapie ou de traitement par méthotrexate et/ou ciclosporine. Il est difficile alors de faire la part des choses lorsque ces complications surviennent sous anti TNF alpha.
Les données du RATIO (Observatoire des effets secondaires des anti TNF alpha) qui regroupe les observations de 486 services hospitaliers font état, sur une période de 2,5 ans, de 16 cas de lymphomes (9 sous infliximab, 4 sous adalimumab et 3 sous étanercept). On peut naturellement toujours s’interroger sur l’exhaustivité du recueil des observations mais ces informations n’en demeurent pas moins rassurantes.

Le traitement par étanercept demande au demeurant une surveillance clinique rigoureuse. Le patient doit être informé des signes auxquels il doit porter attention et qui doivent le conduire à consulter : fièvre, éruption cutanée, essoufflement, apparition de ganglions, fourmillements, faiblesse musculaire. L’apparition de ce type de symptomatologie justifie de suspendre le traitement pour en explorer l’origine infectieuse, hématologique, cardiaque ou neurologique.

Dr Marie-Line Barbet

Référence
Richard MA, Ortonne JP, Paule C : Evolution de la prise en charge du psoriasis en plaques grave : le patient sous Enbrel. Questions pratiques. Symposium. Journées Dermatologiques de Paris, 5 au 9 décembre 2006.

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