Les dangers de la mer à fleur de peau

La mer fascine et attire. Mais elle n’est pas dépourvue de dangers, notamment du fait de la faune et de la flore qui la peuplent. Les morsures occasionnées à la pêche (au barracuda par exemple) en sont un des aspects. Mais ce sont les venins et poisons injectés par certaines espèces qui préoccupent le plus le grand public.

La grande famille des méduses

Il n’est pas rare en effet de voir apparaître dans la grande presse des articles alarmants faisant par exemple état du danger des méduses. Le nombre de méduses augmente depuis quelques années, notamment parce que ses prédateurs naturels (tortues de mer, espadon, thon, requins) disparaissent progressivement, mais aussi parce que leurs possibilités alimentaires augmentent avec les rejets en mer de phosphates et de nitrates en provenance de l’agriculture, qui favorisent la prolifération du plancton. De plus, les méduses survivent mieux que les poissons en milieu pauvre en oxygène, et dans les eaux chaudes favorables aux espèces thermophiles. Ces invertébrés aquatiques, appartenant à l’espèce des Cnidaria (phylum Coelentrata), ne sont heureusement pas tous dangereux : rhizostoma pulmo, cotylorhiza tuberculata, celella velella sont, pour les zoologistes avertis, les plus dangereuses car les plus douloureuses.

Pour rappel, les méduses, dont il existe plusieurs centaines d'espèces, se caractérisent par la présence de nématocystes sur leurs tentacules, nématocystes qui contiennent des filaments enroulés qui se déchargent au contact de corps étrangers en libérant des polypeptides et de nombreux enzymes. Ces toxines provoquent des réactions locales à court terme (douleur, prurit, érythème, œdème, vésiculations, lymphadénopathie, nécrose, voire infections secondaires, ...) et à long terme (hyperpigmentation, chéloïdes, atrophie graisseuse), ainsi que des réactions systémiques (fièvre, nausées et vomissements, urticaire, anaphylaxie, voire décompensation multiorganique et décès).

Mention spéciale à la méduse-boîte qui se distingue des autres méduses par la forme de son ombrelle en forme de cube. Les méduses-boîtes sont connues pour le venin extrêmement puissant produit par certaines espèces : sa morsure provoque le syndrome d'Irukandji, qui comporte des symptômes systémiques, pouvant se traduire par d'intenses maux de tête, des douleurs au dos, des douleurs musculaires, des douleurs à la nuque, des douleurs abdominales, des nausées et vomissements, une transpiration apparente, de l'anxiété, de l'hypertension artérielle, de la tachycardie et un œdème pulmonaire. Elle est surtout présente en Australie.
 
Classiquement, un contact avec une méduse entraîne la décharge de milliers de nématocystes. Il vaut mieux se tenir à distance des bancs de méduses car de fins filaments et des fragments de ces filaments peuvent se détacher du banc et donner l’impression de se baigner dans un ‘bain d’orties’, ce qui a conduit certaines municipalités à tendre des filets au large en cas de mer agitée pour prévenir l’arrivée de ces filaments dans les eaux de baignade.

Quoi qu’il en soit, en cas de contact, il faut rincer abondamment la région atteinte avec de l’eau de mer pour évacuer les nématocystes et gratter la peau touchée avec une carte bancaire ou un couteau pour évacuer les nématocystes restants. La plaie sera ensuite trempée dans du vinaigre ou dans une pâte de soda mélangée avec de l’eau de mer pour désactiver les nématocystes qui n’ont pas explosé. La douleur peut être réduite avec des packs glacés et des corticoïdes puissants peuvent être utilisés. Si nécessaire, des antihistaminiques oraux et des antibiotiques pourront être prescrits. Lawrence Scerri (La Valette, Malte) déconseille fortement de nettoyer à l’eau fraîche ou de frotter la peau car cela favorise la décharge de nématocystes qui n’ont pas explosé. Une vieille croyance recommande d’uriner sur les piqûres de méduses. Certainement pas, selon Scerri, car la concentration en sels et oligoéléments de l’urine est très variable d’une personne à l’autre et d’un moment à l’autre de la journée. Lorsque les urines sont trop diluées, elles provoquent la même réaction que l’eau fraîche en favorisant l’explosant des nématocystes.

L’étrange et dangereuse Galère portugaise

Il faut également se méfier de la Galère portugaise ou Vessie de mer (Physalia physalis) aussi belle que dangereuse qui ressemble à une méduse sans en être une. Comportant quatre types de polypes soutenus en surface par un flotteur de 10 à 20 centimètres, elle déploie ses tentacules sous les vessies, tentacules qui peuvent atteindre 50 mètres de long et qui contiennent des nématocystes capables de traverser une combinaison de plongée. Ces toxines sont paralysantes et cardiotoxiques.

Les oursins et les vives aussi

D’autres espèces marines peuvent provoquer des symptômes en cas de contact intense : l’anémone de mer, certains coraux et certaines éponges, les oursins de par leurs épines difficiles à retirer car elles se cassent et sont susceptibles de provoquer des surinfections. L’idéal est de faire tremper la zone atteinte dans de l’eau chaude afin de détruire les toxines thermolabiles. Les toxines de la vive présentes dans les épines sont également thermolabiles. Enfin, les morsures par un poisson scorpion nécessitent un débridement de la plaie et l’application de chaleur, tandis que la raie n’est pas sans danger non plus car elle peut libérer des substances neurotoxiques, cardiotoxiques ou susceptibles de provoquer une détresse respiratoire.

Dr Dominique-Jean Bouilliez

Référence
Scerri L : Marien Dermatology. 15th EADV spring symposium (Budva, Montenegro) : 3-5 mai 2018.

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