
Pour rappel, le virus SARS-CoV-2 pénètre dans les cellules humaines via le récepteur à l’enzyme de conversion de l’angiotensine de type 2 (ECA2). Tous les patients ne sont pas atteints de la même manière par ce virus et la sévérité du Covid-19 a été associée à une dysrégulation du système immunitaire qui aboutit à une tempête cytokinique marquée notamment chez les non-survivants par une augmentation persistante des taux d’IL-1β, d’IL-6, de TNF-α et d’autres cytokines pro-inflammatoires ainsi que d’une lymphopénie. Cette tempête peut être réduite dans une certaine mesure par des anticorps monoclonaux notamment le tocilizumab, un anti-IL-6.
Dans la présentation du Dr Renaud Du Pasquier (CHU Lausanne), plusieurs déclinaisons neurologiques du Covid-19 sont décrites et des pistes sont émises pour expliquer la physiopathologie de ces atteintes.
Une atteinte neuronale directe par le virus SARS-CoV-2 ?
L’existence de méningo-encéphalites liées au Covid-19 a tout
naturellement poussé les professionnels de santé à se demander si
le virus SARS-CoV-2 affectait directement le cerveau dont les
cellules expriment des récepteurs ECA2. De plus, des analyses
post-mortem du cerveau de patients atteints de SARS-CoV-1 avaient
mis en évidence des neurones infectés par ce virus. Par ailleurs,
des études pré-cliniques ont démontré l’existence d’une mort
neuronale chez des souris transgéniques infectées par le virus
SARS-CoV-1, avec tropisme préférentiel du virus pour le tronc
cérébral et l’hypothalamus. Ce tropisme a conduit certains experts
à émettre l’hypothèse d’une atteinte du centre respiratoire
précipitant la mort de certains patients Covid-19 positifs, sans
que cela n’ait pu être formellement prouvé. Une autre hypothèse a
été avancée selon laquelle le virus pénètrerait au niveau du
cerveau via le nerf olfactif comme le suggèrent les anosmies
fréquemment présentes chez les patients Covid-19 positifs ou
infectés par d’autres souches de coronavirus.
Autres pistes plus probables
Des chercheurs ont réalisé des examens sur pièce d’autopsie qui ont mis en avant un taux élevé (58 %) de thrombose veineuse profonde et d’embolie pulmonaire chez les patients ayant présenté une forme sévère de Covid-19. Ces embolies pulmonaires étant la cause du décès de 4 (sur 12) premiers morts enregistrés à Hambourg (Allemagne), ce qui indique une tendance claire à un état d’hypercoagulabilité en cas d’infection par le virus SARS-CoV-2. Ces résultats concordent avec une autre étude qui a souligné la présence d’une coagulation intravasculaire disséminée chez 71 % des non-survivants du Covid-19. Par ailleurs, une équipe Suisse a récemment démontré le tropisme de ce virus pour les cellules endothéliales, ce qui explique que de très nombreux organes peuvent être atteints. Enfin, certains cas de syndrome de Guillain-Barré ont été décrits chez des patients Covid-19 positifs, suggérant la possibilité d’une polyneuropathie démyélinisante avant le déclenchement des symptômes de l’infection au SARS-CoV-2.De nombreuses questions en suspens
Plusieurs mécanismes ont été incriminés dans la genèse des symptômes neurologiques du Covid-19 : infection directe, réaction inflammatoire exagérée, composante auto-immunitaire, hypercoagulabilité, endothélite, etc. Cependant, les séquelles neuropsychologiques à long terme de cette maladie sont encore inconnues ni l’importance de sa composante neurodégénérative.Dr Dominique-Jean Bouilliez