Lésions à Papillomavirus: bientôt le temps de l’immunothérapie ?

La mise en œuvre de la vaccination préventive contre le HPV se heurte à des obstacles économiques ou sociétaux un peu partout dans le monde, qui freinent sa généralisation. Pendant ce temps, les infections se poursuivent et certaines d’entre elles seront à l’origine de cancers. L’origine virale des cancers du col utérin et de certains cancers de l’oropharynx, et les altérations de l’immunité responsables de leur développement, ont suggéré la possibilité d’une immunothérapie pour les individus déjà infectés et diagnostiqués avec une lésion en lien avec l’HPV. L’expression de deux oncoprotéines, E6 et E7 est essentielle pour l’induction et le maintien de la transformation maligne et c’est ainsi qu’elles sont devenues les cibles des recherches sur l’immunothérapie.

Plusieurs expérimentations sont en cours, dont certaines ont été présentées lors de l’Eurogyn 2015.

Un de ces travails a été mené chez 206 patientes porteuses d’un CIN 2/3. Les unes ont reçu le vaccin thérapeutique, à raison de 3 injections sous-cutanées d’un vaccin MVA-B, suivies à 6 mois d’une conisation, et à 30 mois d’un examen de contrôle. Les autres ont suivi le même protocole mais avec un placebo. A 6 mois, une réponse histologique (<CIN2) était présente chez 36 % des femmes ayant reçu l’immunothérapie contre 21 % du groupe placebo. A 30 mois, il n’est pas retrouvé de différence significative entre les 2 groupes (1).

Un autre essai de phase II B a testé un vaccin thérapeutique sur 167 patientes, elles aussi, atteintes d’un CIN2/3. Le vaccin était administré par voie intra-musculaire en 3 doses puis il était procédé à une électroporation (application d’un champ électrique déstabilisant les membranes, permettant à l’ADN extra-cellulaire de pénétrer dans les cellules), aux semaines 0, 4 et 12. Les patientes recevant l’immunothérapie ont été comparées à un groupe placebo. Comparativement au groupe placebo, un pourcentage supérieur de patientes traitées par immunothérapie ont présenté une régression des lésions en CIN1 ou une disparition complète de celles-ci. L’analyse sérique montre que le vaccin est capable de déclencher une forte réaction de l’immunité cellulaire.

Le cancer du col de l’utérus n’est pas le seul à être visé par l’immunothérapie. Le HPV est en effet responsable d’un nombre croissant de cancers de la tête et du cou (cavité buccale, pharynx, larynx, sinus, fosses nasales, nasopharynx). Une équipe française a démontré qu’une immunothérapie administrée par voie nasale induisait une augmentation des lymphocytes T CD8 spécifiques de l’oncoprotéine E7, impliquée dans l’induction de la transformation maligne. Le même effet n’était pas retrouvé quand l’injection se faisait par voie intramusculaire (3).

Ces travaux semblent prometteurs. L’immunothérapie pourrait être le point de départ d’une nouvelle approche de la prise en charge des lésions à papillomavirus, en attendant la généralisation de la vaccination préventive.

Dr Roseline Péluchon

Références
(1)Harper DM et coll. : Human papilloma clearance following HPV targeted immunotherapy, tipapkinigen sovacivec, in patients with high grade cervical intraepithelial neoplasia (CIN).
(2)Sardesai N.Y. et coll. : HPV-specific immunotherapy (VGX-3100) induces potent T-cell responses and regression of cervical intraepithelial neoplasia in a randomized phase IIB study.
(3)Badoual C. et coll. : Immunotherapy of HPV associated head and neck cancer.
Eurogyn (European Research Organisation on Genital Infection and Neoplasia) (Séville, Espagne): 4-7 Février 2015.

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Les réactions aux articles sont réservées aux professionnels de santé inscrits
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.

Réagir à cet article