Leucémies aiguës lymphoblastiques de l’enfant : mise au point

L’intérêt d’une table ronde sur les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) tient en deux chiffres : ¼ des cancers de l’enfant et de l’adolescent sont des LAL et, en 40 ans, le taux de survie des LAL est passé de moins de 20 % à 80 %.

L’amélioration du pronostic est surtout due aux progrès réalisés dans le domaine des chimiothérapies. Rappelons que l’utilisation des cytotoxiques (vincristine, asparaginase, anthracyclines, cytarabine) et la prophylaxie des rechutes méningées par injections intra-thécales et irradiation encéphalique datent des années 1960-1970. Ce qui a changé, ce sont les protocoles et « l’intensification » permise par les « soins de support » dans certaines formes de LAL.

Dès le diagnostic posé, il convient de préciser l’immunophénotype de la LAL et de rechercher des anomalies génétiques (cytologiques et/ou moléculaires).

On peut ainsi distinguer 4 situations :
-l’enfant qui a une LAL de la lignée B de risque standard (55 % des LAL). Agé de 1 à 10 ans, son taux de leucocytes est inférieur à 50 000 leucocytes/mm³ et il ne présente pas d’anomalies génétiques péjoratives.

-l’enfant qui a une LAL de la lignée B de haut risque (30 % des LAL). Il est âgé de plus de 10 ans et/ou a un taux de leucocytes > 50 000 leucocytes/mm³. Les translocations/transcrits de fusion t(9;22)/BCR-ABL, t(4;11)/MLL-AFU, d’autres arrangements du gène MLL sur le chromosome 11, un nombre de chromosomes < 45 augurent d’un très mauvais pronostic.

-le nourrisson d’un 1 an ou moins (2 % des LAL). Il a dans ¾ des cas une LAL pro-B (CD 19+, CD 10 -) avec réarrangement du gène MLL, qui est grave.

-l’enfant qui a une LAL de la lignée T (13 %). Il est considéré à part ou rapproché des LAL B de haut risque.

La réponse au traitement d’induction et la détection de la « maladie résiduelle » seront ultérieurement intégrées à l’estimation du pronostic.

Le protocole étant choisi, le traitement comporte une phase d’induction, une phase de consolidation, une phase d’intensification, et une phase d’entretien, qui se succèdent sur une période de 2 à 3 ans. La prophylaxie des rechutes méningées nécessite des injections intra-thécales de méthotrexate, parfois à haute dose, et une irradiation de l’encéphale jusqu’à C2.

Quelle est la place de la greffe de moelle osseuse dans le traitement de la LAL ? On devrait plutôt dire, de l’allogreffe de cellules souches hématopoiétiques. Il y a actuellement un consensus, d’une part, pour les LAL de très haut risque en première rémission complète (RC 1), où les résultats de l’allogreffe semblent supérieurs à ceux de la chimiothérapie seule, et d’autre part, pour la plupart des LAL en RC ≥ 2.

Les trois écueils majeurs de la technique sont la difficulté à « obtenir un greffon pour tous », la rechute, et la toxicité de la greffe. Deux autres sources de cellules sont, à défaut, envisageables : les greffons d’origine placentaire et les greffons haplo-identiques parentaux.

En définitive, les progrès sont globalement très importants, mais il persiste des défis thérapeutiques : récidives, LAL à très haut risque (nourrisson ; translocation 9;22, etc).
Par ailleurs, avec la survie d’un nombre croissant de patients leucémiques, se pose le problème du devenir à long terme, c’est-à-dire au-delà de 5 ans. Si les rechutes tardives sont rares, les séquelles organiques (cardiomyopathies, ostéopénies) et les troubles de la croissance et du développement pubertaires sont fréquents. Ils doivent être dépistés et pris en charge, mais le mieux est d’essayer de les prévenir. Enfin, il faut se préoccuper des répercussions psychologiques de la maladie sur le patient et sa famille.

La prise en charge d’un enfant atteint de LAL doit se développer dans la durée, avec la collaboration des services de pédiatrie de proximité et des médecins de famille et avec le soutien des associations de patients.

Dr Jean-Marc Retbi

Référence
Table ronde organisée par Leverger G et Baruchel A : « Les leucémies aiguës lymphoblastisques de l’enfant et de l’adolescent ». Journées Parisiennes de Pédiatrie (Paris) : 6-7 octobre 2007.

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