L’Indonésie submergée par le variant Delta

Jakarta, le jeudi 8 juillet 2021 - Après l’Inde et la Russie, c’est au tour de l’Indonésie d’être submergée par le variant Delta. Mercredi 7 juillet, les autorités ont fait état de plus de 1 040 décès en 24 heures liés à SARS-CoV-2, alors que le nombre quotidien de nouvelles contaminations s'est établi à 34 379. L'archipel de plus de 270 millions d’habitants est confronté à sa plus meurtrière vague épidémique depuis l'apparition de la maladie en novembre 2019.

Une vague sans précédent

Il a fallu attendre le 2 mars 2020 pour que le premier cas d’infection par SARS-CoV-2 soit recensé en Indonésie chez un professeur de danse contaminé par un ressortissant en provenance du Japon. Mais à la différence de l’Europe, le pays avait été relativement épargné par la première vague de Covid-19.

L’apparition du variant Delta a brutalement changé la donne. Entre le 1er juin et le 7 juillet 2021, le pays est passé de 5 700 cas en moyenne par jour à plus de 30 000. Aucun signe d’infléchissement de la courbe ne se fait sentir à l’heure actuelle.

Il faut dire que le gouvernement semble avoir tardé à prendre la mesure de l’évolution provoquée par le variant Delta. Alors que des restrictions drastiques étaient déjà en vigueur sur les îles de Java et Bali, des nouvelles dispositions allant de la fermeture des restaurants et des mosquées ont été annoncées mercredi 7 juillet. Elles concernent des dizaines de villes de Sumatra, dans l’ouest, jusqu'à la Papouasie occidentale, dans l’est.

L’efficacité de ces mesures est d’ailleurs remise en question par de nombreux épidémiologistes. Pour Dicky Budiman, interrogé par RFI, ces dernières arrivent trop tard, et ne vont pas assez loin : « Malheureusement, il faut le dire, ces dernières mesures sont loin d’être suffisantes ce n’est pas suffisant face au variant Delta. Il faudrait apprendre des autres pays qui ont eu affaire à lui et combiner les stratégies, augmenter le nombre de tests également, ne pas seulement isoler ou mettre en quarantaine, et vraiment accélérer la vaccination pour atteindre au moins la moitié de la population. »

Écroulement du système de santé

Au-delà des statistiques, les témoignages sur place laissent présager une situation humanitaire difficile. « Le système de santé est proche de l’effondrement, les hôpitaux sont débordés, les réserves d’oxygène manquent et les services de santé de Java et Bali sont terriblement sous-équipés pour faire face à cette hausse du nombre de patients dans un état critique », a déploré dans un communiqué l’ONG Save the Children. Les hôpitaux bondés refusent des patients, obligeant les familles désespérées à chercher, comme en Inde ou en Tunisie, de l’oxygène pour soigner les malades et les mourants à domicile.

La vaccination par Sinovac en question

Pourtant, le pays s’était engagé dès le mois de janvier dans une campagne de vaccination qui se voulait énergique. Le président Joko Widodo avait annoncé dès le mois de décembre 2020 que l’accès au vaccin serait gratuit et avait promis de se faire vacciner en premier.

Pour inciter la population, les autorités religieuses ont décrété que le vaccin était halal, ce qui a son importance dans le pays qui compte le plus de musulmans au monde. Par ailleurs, les pouvoirs publics ont tâché de rendre la vaccination obligatoire en menaçant d'infliger des amendes ou de retirer les aides sociales aux réfractaires. Malgré ces mesures, seuls 12,3 % de la population ont reçu à la date du 8 juillet les deux doses de vaccin.

Le fort sentiment anti-chinois semble ainsi avoir entravé la campagne. Pour l’épidémiologiste Najmah interrogé par FranceInfo, au-delà du sentiment anti-chinois, il y a une crise de confiance à l'égard du gouvernement indonésien. « Le gouvernement doit prendre ce problème à bras le corps et le résoudre avec plus de transparence et moins de mesures coercitives. Car on constate une sorte de résistance collective si le gouvernement essaie de résoudre cela avec plus de sanctions ».

Mais surtout, c’est l’efficacité du vaccin lui-même contre le variant Delta qui est désormais mis en cause. Le personnel soignant a par exemple été une des premières populations à bénéficier du vaccin chinois Sinovac, et parmi les soignants décédés au mois de juin, une majorité était vaccinée depuis plusieurs mois. Pour Dicky Budiman, deux constats importants s’imposent : « D’abord il semble que l’efficacité du vaccin Sinovac se réduise après six mois. Ensuite, il semble que son efficacité ne soit pas assez bonne pour faire face au variant Delta. »

C.H.

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