
Une vague sans précédent
Il a fallu attendre le 2 mars 2020 pour que le premier cas
d’infection par SARS-CoV-2 soit recensé en Indonésie chez un
professeur de danse contaminé par un ressortissant en provenance du
Japon. Mais à la différence de l’Europe, le pays avait été
relativement épargné par la première vague de Covid-19.
L’apparition du variant Delta a brutalement changé la donne.
Entre le 1er juin et le 7 juillet 2021, le
pays est passé de 5 700 cas en moyenne par jour à plus de 30 000.
Aucun signe d’infléchissement de la courbe ne se fait sentir à
l’heure actuelle.
Il faut dire que le gouvernement semble avoir tardé à prendre
la mesure de l’évolution provoquée par le variant Delta. Alors que
des restrictions drastiques étaient déjà en vigueur sur les îles de
Java et Bali, des nouvelles dispositions allant de la fermeture des
restaurants et des mosquées ont été annoncées mercredi 7 juillet.
Elles concernent des dizaines de villes de Sumatra, dans l’ouest,
jusqu'à la Papouasie occidentale, dans l’est.
L’efficacité de ces mesures est d’ailleurs remise en question
par de nombreux épidémiologistes. Pour Dicky Budiman, interrogé par
RFI, ces dernières arrivent trop tard, et ne vont pas assez loin :
« Malheureusement, il faut le dire, ces dernières mesures sont
loin d’être suffisantes ce n’est pas suffisant face au variant
Delta. Il faudrait apprendre des autres pays qui ont eu affaire à
lui et combiner les stratégies, augmenter le nombre de tests
également, ne pas seulement isoler ou mettre en quarantaine, et
vraiment accélérer la vaccination pour atteindre au moins la moitié
de la population. »
Écroulement du système de santé
Au-delà des statistiques, les témoignages sur place laissent présager une situation humanitaire difficile. « Le système de santé est proche de l’effondrement, les hôpitaux sont débordés, les réserves d’oxygène manquent et les services de santé de Java et Bali sont terriblement sous-équipés pour faire face à cette hausse du nombre de patients dans un état critique », a déploré dans un communiqué l’ONG Save the Children. Les hôpitaux bondés refusent des patients, obligeant les familles désespérées à chercher, comme en Inde ou en Tunisie, de l’oxygène pour soigner les malades et les mourants à domicile.La vaccination par Sinovac en question
Pourtant, le pays s’était engagé dès le mois de janvier dans
une campagne de vaccination qui se voulait énergique. Le président
Joko Widodo avait annoncé dès le mois de décembre 2020 que l’accès
au vaccin serait gratuit et avait promis de se faire vacciner en
premier.
Pour inciter la population, les autorités religieuses ont
décrété que le vaccin était halal, ce qui a son importance dans le
pays qui compte le plus de musulmans au monde. Par ailleurs, les
pouvoirs publics ont tâché de rendre la vaccination obligatoire en
menaçant d'infliger des amendes ou de retirer les aides sociales
aux réfractaires. Malgré ces mesures, seuls 12,3 % de la population
ont reçu à la date du 8 juillet les deux doses de vaccin.
Le fort sentiment anti-chinois semble ainsi avoir entravé la
campagne. Pour l’épidémiologiste Najmah interrogé par FranceInfo,
au-delà du sentiment anti-chinois, il y a une crise de confiance à
l'égard du gouvernement indonésien. « Le gouvernement doit
prendre ce problème à bras le corps et le résoudre avec plus de
transparence et moins de mesures coercitives. Car on constate une
sorte de résistance collective si le gouvernement essaie de
résoudre cela avec plus de sanctions ».
C.H.