
Ainsi, les nourrissons chez lesquels les réseaux entre les microbiomes sont plus développés et moins fragmentaires que chez d’autres pourraient être moins sensibles aux infections respiratoires, voire développer des formes moins sévères de celles-ci. Qui plus est, un réseau microbien bien structuré et stable dès le premier âge pourrait avoir un effet sur la santé respiratoire tout au long de la vie.
Ces hypothèses découlent en partie d’une étude présentée à l’ERS dans laquelle la maturation des réseaux microbiens « transniches » a été étudiée chez 120 nouveau-nés aux âges respectifs d’une, deux, quatre semaines et six mois. Parallèlement, la susceptibilité aux infections respiratoires a été prise en compte. Sur le plan méthodologique, l’analyse a reposé sur le séquençage des gènes de l’ARN ribosomal 16S rRNA pour identifier les bactéries présentes dans des échantillons d’origines diverses : cavité buccale, nasopharynx et fèces. Cette approche a été complétée par le recours à un logiciel spécifique dit spiecEasi (Sparse Inverse Covariance for Ecological Statistical Inference) élaboré pour la recherche de réseaux au sein d’un écosystème microbien donné. Les réseaux obtenus ont été stratifiés en fonction du nombre d’infections respiratoires contractée pendant la première année de la vie.
A l’âge d’une semaine, chez les nouveau-nés qui n’ont présenté que 0 à 2 infections de ce type en l’espace d’une année, les réseaux microbiens étaient bien définis sous la forme de quatre grands clusters. Trois d’entre eux étaient composés d’espèces bactériennes propres à une niche donnée et le quatrième plus hétérogène représenté par des espèces plus variées et moins spécifiques que les précédentes. Ces clusters se sont avérée stables au cours du temps tant dans leur composition que dans leurs connexions. Chez les nourrissons qui ont développé plus d’infections respiratoires au cours de la première année de leur vie, les réseaux microbiens se sont avérés plus fragmentés et composés de clusters à la fois plus petits et moins connectés. De ce fait, ils seraient moins efficaces dans la prévention des infections précoces.
Des questions se posent désormais : la maturation du microbiome peut-elle avoir un impact dès le premier âge sur la santé respiratoire de l’enfant, voire de l’adulte ? Quel est le rôle exact de ce facteur ? Faut-il envisager des stratégies capables d’influer ce dernier et d’ailleurs, en existe-t-il ? D’autres études de ce type sont à l’évidence nécessaires dans le but de répliquer les résultats présentés à l’ERS et d’apporter des réponses aux questions précédentes.
Dr Philippe Tellier