Moins stressantes les grossesses après PMA ?

Pour de nombreux futurs parents, la grossesse peut être vécue comme une période particulièrement stressante. Les couples ayant vécu un parcours plus ou moins long d’infertilité pourraient, selon des études, être plus à risque de stress, d’anxiété voire de dépression au cours de la grossesse tant attendue. Des difficultés psychologiques au cours de la grossesse peuvent qui plus est, avoir des conséquences sur le fœtus telles qu’un accouchement prématuré, un retard de croissance intra-utérin, des troubles du développement neurologique et une augmentation des problèmes émotionnels de l’enfant.

La prise en charge en aide médicale à la procréation (AMP), en particulier si elle implique des techniques de fécondation in vitro (FIV) peut être lourde et stressante (injections quotidiennes, suivi régulier à l’hôpital avec échographies endovaginales et prise de sang, ponction d’ovocytes par voie vaginale etc.), sans certitude d’obtenir une grossesse au cours du parcours. Les couples peuvent également expérimenter une forme d’isolement social en lien avec les difficultés de l’infertilité. Même une fois la grossesse obtenue, elle peut être source de stress, particulièrement au 1er trimestre avec une anxiété vis-à-vis du risque de fausse couche.

Les études publiées sur l’anxiété et la dépression au cours des grossesses après AMP ont des résultats discordants. Une explication possible serait qu’elles ne prenaient pas assez en considération les facteurs confondants.

Cette étude originale a été réalisée avec 2 objectifs distincts, le premier était de comparer, sur un large échantillon, les niveaux de stress des futurs parents entre les grossesses spontanées et celles issues d’AMP. Le second, était de comparer, l’anxiété et la dépression gestationnelles de futurs parents ayant eu 2 grossesses consécutives, une spontanée et une issue d’AMP, ce qui n’avait jamais été réalisé par le passé.

Une étude de cohorte sur plus de 100 000 grossesses

Cette étude, menée par le Norwergian Institute of Public Health a utilisé les données du Norwegian Mother, Father and Child cohort study qui comprend 111 143 mères et 76 594 pères dont 2 960 femmes enceintes et 2 237 hommes dont la grossesse faisait suite à de l’AMP.

Un sous-groupe de 286 femmes ayant eu à la fois une grossesse spontanée et une grossesse issue d’AMP lors de leurs deux premières grossesses a été analysé ; parmi elles 166 ont une grossesse issue d’AMP initialement.

Le niveau d’anxiété et la dépression ont été évalués 2 fois chez les femmes au cours de la grossesse, à 17 et 30 semaines de grossesse (SG), en utilisant 2 versions courtes validées de la Hopkins Symptoms Checklist (SCL-5 et SCL-8). Concernant le père, l’évaluation n’a été faite qu’avec le questionnaire SCL-8 à 17 SG. La qualité de la relation de couple a également été évaluée à 17 SG via le questionnaire Relationship Satisfaction Scale.

Des mères plus ou moins stressées

L’étude sur l’ensemble de la cohorte a retrouvé que les femmes enceintes suite à une prise en charge en AMP présentaient significativement moins de stress ou de symptômes dépressifs que les femmes ayant une grossesse spontanée, que ce soit à 17 ou 30 SG. Il en est de même pour leur conjoint qui ont répondu au questionnaire à 17 SG. Les facteurs tels que l’âge, la parité et le niveau d’éducation ne semblaient pas affecter ces résultats. La relation conjugale était également significativement plus satisfaisante pour les couples dont la grossesse faisait suite à de l’AMP comparativement à ceux ayant une grossesse spontanée.

En revanche, pour les couples ayant eu une grossesse spontanée et une grossesse issue d’AMP, il a été trouvé que les femmes étaient significativement plus anxieuses ou dépressives à 17 SG pour leur grossesse suite à AMP par rapport à leur grossesse spontanée, ces résultats étaient similaires après ajustement sur l’âge, le niveau d’éducation et le fait que la grossesse suite à de l’AMP soit survenue en premier ou non. A 30 SG et pour les hommes, il n’y avait pas de différence significative retrouvée entre les 2 grossesses.

Les patientes enceintes suite à une prise en charge en AMP semblent moins stressées au cours de leur grossesse que celles de la population générale dont la grossesse est spontanée. Cela peut être expliqué par des modifications environnementales et peut-être une meilleure préparation à la venue de l’enfant à venir. Les femmes ayant eu une grossesse spontanée et une grossesse issue d’AMP étaient significativement plus stressée en début de grossesse pour celle issue d’AMP probablement en lien avec un stress accru du risque de fausse couche.

Dr Marine Beaumont

Référence
Oftedal A, Tsotsi S, Kaasen A, et al. Anxiety and depression in expectant parents: ART versus spontaneous conception. Hum Reprod. 2023 Sep 5;38(9):1755-1760. doi: 10.1093/humrep/dead133.

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