
Deux grandes bases de données étatsuniennes
C’est à ces questions que répond une étude rétrospective du type cas-témoins, basée sur deux grandes bases de données électroniques étatsuniennes, respectivement Optum-Humedica (H-DB) et Guardian Research Network (G-DB), mises à contribution pour la période du 1er octobre 2015 au 10 mars 2020.
Ont été inclus 21 362 patients adultes atteints d’une leucémie
lymphoïde chronique, d’un lymphome à petites cellules B, d’un
myélome multiple ou encore d’un lymphome non hodgkinien. Parmi les
critères d’exclusion, figuraient le déficit immunitaire primaire ou
le DIS constaté lors de la préinclusion. Un algorithme adapté a
pris en compte le diagnostic, les taux sériques d’immunoglobulines
G (IgG) et les infections ou les traitements.
C’est ainsi qu’ont été constituées deux cohortes, selon
l’existence (n= 2 221) ou non (n=19 141) d’un DIS constaté au début
du suivi. Le DIS a été défini biologiquement par une
hypogammaglobulinémie ou un taux sérique d’IgG <5,0 g/l. Ce sont
les infections bactériennes sévères survenues au cours des 12 mois
de suivi qui ont constitué le critère de jugement primaire. Le
critère secondaire a été la survie globale.
Plus d’infections bactériennes et surmortalité à 24 mois
L’âge moyen était voisin dans les deux cohortes (H-DB/G-DB) :
en cas de DIS, 67,3/70,6 ans versus 67,9/72,2 ans en
l’absence de DIS ; tout comme la proportion d’hommes (54,8 %/56,1 %
versus 52,8 %/53,6 %). Au terme de 12 mois de suivi,
l’existence d’un DIS a été associée à un risque plus élevé
d’infections (≥1 infection) : dans les deux cohortes, p<0,001
versus absence de DIS.
Ce sont les infections bactériennes qui ont nettement dominé
la scène dans les deux cohortes (H-DB/G-DB), soit 55,1 %/54,6 %
(DIS+) versus 24,0 %/25,7 % (DIS-). Les infections
bactériennes sévères ont été au nombre moyen de 7,6±9,9/2,9±2,7
(H-DB/G-DB) (DIS+) versus 5,2±6,8/2,4±2,2 (DIS-), p<0,001
dans les deux cohortes.
La même tendance a été observée pour ce qui est de la
proportion des patients ayant bénéficié d’au moins une
hospitalisation et du recours aux traitements anti-infectieux
(p<0,001 dans les deux cohortes et les deux cas de figure). Le
taux de survie globale à 24 mois est, pour sa part,
significativement plus faible en cas de DIS, soit (H-DB/G-DB) 76,3
%/77,3 % versus 86,9 %/87,8 % en l’absence de DIS.
Cette étude est certes rétrospective, mais elle n’en porte pas moins sur plus de 21 000 patients atteints d’une néoplasie lymphoïde, répartis en deux cohortes indépendantes. Les résultats issus de l’une et de l’autre sont concordants et, à ce titre, il convient de détecter le plus précocement possible un déficit immunitaire secondaire dans un tel contexte, pour minimiser le risque d’infections bactériennes sévères susceptibles de mettre en jeu le pronostic vital comme en témoigne la surmortalité associée au DIS.
Dr Philippe Tellier