Non substituable : quelle affaire !

Paris, le samedi 9 février 2013 – Les turbulences observées l’année dernière concernant les médicaments génériques semblent s’apaiser en ce début d’année, en grande partie grâce à une remontée spectaculaire des taux de substitution. Pourtant, pour certains, la solution, apparemment efficace, utilisée par l’Assurance maladie, soit la réactivation du dispositif « tiers payant contre générique » et l’obligation pour les médecins de mentionner leur refus de substitution par la mention manuscrite et en toutes lettres « non substituable » est une profonde offense faite aux praticiens. L’Union des médecins généralistes et la Fédération des médecins de France (FMF) à laquelle la première est affiliée ont fait de cette cause leur cheval de bataille. Ici, le président d’Union Généraliste, le docteur Claude Bronner, nous explique au pied de la lettre les raisons de la colère des médecins.

Par le Dr Claude Bronner, Strasbourg, président d’Union Généraliste

Comparée aux autres pays, la France est faible consommatrice de génériques. Les génériques sont pourtant habituellement aussi efficaces que les princeps et sources d’économies ! Toutefois, si le médicament agit certes essentiellement par sa molécule, on ne peut négliger l’effet de sa forme, sa couleur, sa texture et l’imaginaire du patient, sans parler des quelques cas de médicament à marge étroite ou à galénique vraiment particulière (buprénorphine par exemple).
Le nier représente à l’évidence une véritable régression.
Puisque les médecins restaient attachés aux princeps, malgré des tentatives avortées comme la prescription obligatoire en DCI à l’occasion de la revalorisation du C à 20 € en 2002, la substitution a été confiée aux pharmaciens plus enclins à accepter les contrats économiques gagnant-gagnant.

Ils ont ainsi acquis le droit de substituer avec l’accord des patients quelle que soit la prescription du médecin. Et la part des génériques a grimpé lentement en même temps que s’accroissait leur importance dans le revenu des pharmaciens.
Les médecins et les patients qui refusent le générique sont donc devenus des gêneurs : il fallait les mettre au pas.

Punition : faire des lignes

Dès 1999 est paru le fameux texte obligeant les médecins à écrire « non substituable » à la main devant chaque médicament qu’il veut sortir de la substitution. Une véritable punition pour le médecin informatisé. Mesure vexatoire d’autant plus illogique qu’on a incité les médecins à s’informatiser et qu’il est facile pour un patient de gribouiller « non substituable » sur une ordonnance informatisée. Il n’a donc pas été vraiment appliqué.
Restaient les patients : pour eux, l’Assurance Maladie a trouvé le bâton adapté. Pas de tiers payant si refus du générique : seul celui qui a les moyens d’avancer le montant de l’ordonnance a droit au médicament de son choix. C’est une mesure discriminatoire pour les plus pauvres et les plus malades (ceux qui ont les ordonnances les plus coûteuses).
Du coup, le « non substituable »  à la main qui permet au patient d’échapper à cette sanction et au pharmacien d’éviter le retour à l’envoyeur des dossiers non conformes est devenu un sujet d’agitation entre patients, pharmaciens et médecins avec une révolte justifiée de ces derniers. Plus de 5000 ont signé la pétition de la Fédération des médecins de France (FMF) et 69 % ont déclaré à une enquête du Généraliste que c’était ce qui les avait le plus agacé en 2012 !

A quand une réforme courageuse ?

La Ministre a admit qu’il fallait changer cela et on attend qu’elle agisse. Mais comme d’habitude, elle laisse l’Assurance Maladie « appliquer la loi » en attendant des jours meilleurs dans un jeu pervers révoltant pour les médecins, qui souhaitent tout simplement qu’on les laisse prescrire comme ils en ont envie et que l’Assurance maladie rembourse au même prix les mêmes molécules, quitte à laisser le patient payer son choix de confort ou son vécu d’efficacité en acquittant la différence quand elle existe : c’est le tarif forfaitaire de responsabilité (TFR).
Mais la réforme serait courageuse car complexe, pourtant utile à la sérénité des relations entre les protagonistes. En attendant, les médecins résistent avec des mentions « non substituables » plus nombreuses que nécessaire, dénigrent le générique, prescrivent plus facilement hors répertoire. Est ce bien le but recherché ?

Les intertitres sont de la rédaction

Liens complémentaires :

Textes réglementaires sur le Non Substituable
http://www.apima.org/img_bronner/non_substituable_loi.pdf

Rapport IGAS sur les génériques (09/12)
http://www.apima.org/img_bronner/1209_IGAS_rapport_generiques.pdf

Rapport ANSM sur les génériques (12/12)
http://www.apima.org/img_bronner/Ansm_Rapport-Generiques_Decembre2012.pdf

Pétion FMF sur le refus du non substituable manuscrit
http://www.apima.org/EG_sondage/120918_petition_non_substituable/enquete.htm

Signataires de la pétition FMF sur le refus du Non Substituable à la main
http://www.apima.org/EG_sondage/120918_petition_non_substituable/petition.php

Résultat pétition FMF sur le Non Substituable (question complémentaires)
http://www.apima.org/img_bronner/Petition_non_substituable_resultat.pdf

Commentaires pétition FMF sur le Non Substituable
http://www.apima.org/img_bronner/commentaires_petition_non_substituable.pdf

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