L'utilisation de méthodes de double marquage antérograde des voies neurales, à l'aide de traceurs à haute sensibilité tels que la leucoaglutinine de Phaseo vulgaris ou la biocytine, a permis de jeter un lumière nouvelle sur l'organisation de la circuiterie neuronale des noyaux gris centraux (NGC) des primates et de révéler, d'après A. Parent et L. Naz-Hasrati, un niveau de complexité jusqu'alors méconnu. Toutefois, le schéma général du traitement de la motricité n'en reste pas moins valable (Figure 1).
Ainsi, en recevant les afférences issues de toute l'étendue du manteau cortical, le striatum joue un rôle intégrateur majeur au sein du complexe modulateur de la motricité que forment les NGC. Avec un éventuel relais dans le globus pallidus externe (GPe), il projette sur les 2 structures efférentes : globus pallidus interne (GPi) et la partie dorsale réticulée, du locus niger (substantia nigra reticulata : SNr). A partir du GPi et du SNr, soumis à l'action excitatrice du noyau sous-thalamique (NST), les efférences modulent l'activité du cortex moteur rolandique avec le relais obligatoire du noyau latéro-ventral intermédiaire du thalamus.
Contrairement aux données classiques, et en dépit du haut degré de convergence de "l'entonnoir anatomique" striato-pallidal, les projections de 2 populations neuronales adjacentes du striatum échappent à tout recoupement. Ainsi, la double injection de leucoaglutinine et de biocytine dans 2 populations striatales contiguës, va marquer 2 bandes distinctes en aval. Ce haut degré de discrimination somatotopique assure la conservation de l'information dans la traversée d'une structure anatomique peu favorable à cet objectif. A partir du GPi et de la SNr, la collatéralisation est en revanche la règle, avec arborisation des efférences, vers les différents noyaux du thalamus, le colliculus supérieur, la réticulée mésencéphalique, les noyaux du tronc. Elle permet, par la diversification de l'information striatale, son amplification et son traitement à différents niveaux du SNC impliqués dans la régulation du tonus, de la posture, d'aspects spécifiques de la motricité et d'activités neurovégétatives. Le double marquage neuronal a, par ailleurs, permis la mise en évidence d'une convergence pallidale des innervations d'origine striatale et sous-thalamique : les fibres issues du striatum et celles qui trouvent leur origine dans le NST se distribuent à des territoires pallidaux internes homologues selon des modalités différentes. Les axones issus du NST se terminent principalement sur le corps cellulaire de leur cible pallidale et innervent sur ce mode toute une colonne de neurones du GPi. En revanche, le neurone striatal homologue ne noue, en passant, que des contacts marginaux avec la majorité des neurones de cette colonne. Il se termine sur une cible striatale avec laquelle il établit des contacts synaptiques privilégiés impliquant autant l'aire somatodendritique distale que les dendrites éloignées du corps cellulaire.
A cette dualité morphologique, correspondent des modalités fonctionnelles et neurochimiques différentes. Comme le striatum, le NST reçoit des efférences corticales, plus restreintes toutefois car presqu'exclusivement issues des aires sensori-motrices.

Un acide dans le circuit
Au sein de leur champ terminal, les fibres issues du NST excercent une action tonique excitatrice sur de larges populations neuronales du GPi. Un acide aminé excitateur, l'acide glutamique en assure la médiation (Figure 2 [a et b]). La modulation striatale de l'activité du GPi est plus fine, plus sélective, et concerne des populations plus réduites de neurones. Elle se fait par l'intermédiaire du GABA. Le flux pallidal efférent dépend donc de l'équilibre entre les activités respectives du striatum et du NST. Par le biais des relais thalamiques, il inhibe la voie finale commune de la motricité.
Ainsi, l'activité du NST aggrave un syndrome parkinsonien
expérimental et sa destruction stéréotaxique l'améliore. Les
inhibiteurs des acides aminés excitateurs
revendiquent le même impact thérapeutique. La connaissance de
l'anatomie fonctionnelle de la micro-circuiterie n'est donc pas
dénuée d'application pratique.
Parent A. et coll. : "Anatomical aspects of information processing in primate basal ganglia". TINS, 1993 ; 16 : 111-115.
Christian Meyrignac