Si les facteurs de risque de l’ostéoporose sont maintenant assez bien repérés, il reste encore beaucoup de zones d’ombre en ce qui concerne les mécanismes physiopathologiques.
Deux études récentes s’intéressent aux liens entre ostéoporose et deux hormones peptidiques, l’ocytocine et la leptine. L’ocytocine, hormone neurohypophysaire, est connue depuis longtemps pour ses effets de renforcement des contractions utérines au moment de l’accouchement. La leptine, produite par le tissu adipeux, a démontré son action sur le comportement alimentaire et les dépenses énergétiques.
Mais le rôle de l’ocytocine (OT) ne se réduit pas à son action sur les contractions utérines. Il a été démontré expérimentalement chez la souris que la perte osseuse induite par une ovariectomie est inhibée par l’injection sous-cutanée d’OT. Et l’on sait aussi que les taux sériques d’OT diminuent chez les femmes ménopausées. Mais cette diminution est-elle un élément indépendant ou est-elle corrélée à la diminution d’autres facteurs hormonaux, leptine et oestradiol notamment, connus pour moduler la sécrétion d’OT ?
Pour le savoir, une étude a été effectuée sur 2 groupes de femmes ménopausées. Les unes présentaient une ostéoporose fracturaire non traitée, les autres ne présentaient ni fracture ni ostéoporose. Ont été dosés entre autres paramètres, les concentrations sériques d’OT, oestradiol ultra-sensible, SHBG (Sex Hormon Binding Globulin), leptine, DMO et composition corporelle.
La comparaison entre les groupes montre une concentration sérique d’OT, significativement diminuée dans le groupe ostéoporose (110,64 versus 50,22 pg/ml), et corrélée à la DMO lombaire. Les auteurs montrent que la relation entre OT et ostéoporose persiste indépendamment de l’âge, des taux de leptine et d’oestradiol.
Par ailleurs, cette étude confirme la corrélation entre taux de leptine et IMC (r=+0,48), masse grasse (r=+0,67), masse maigre (r=+0,56), SHBG (r=-0,51), DMO lombaire (r=+0,48) et DMO fémorale (r=+0,55).
Ce lien entre leptine et ostéoporose était d’ailleurs l’objectif principal d’une autre étude, portant sur 103 patientes âgées de 24,9+/-7,4 ans, atteintes d’anorexie mentale. Vingt-quatre de ces patientes avaient des antécédents de fracture sans traumatisme majeur. Elles avaient une durée moyenne d’aménorrhée de 2,9 +/- 4,6 ans. Près de la moitié de ces patientes (48,6 %) avaient une ostéopénie, 22,3 % une ostéoporose et 29,1 % avaient une densité osseuse normale. Le taux moyen de leptine était de 3,9 +/- 4,6 ng/ml (N : 3,5 à 11 ng/ml) et les auteurs notent une corrélation positive entre la leptine et la DMO rachidienne, corrélation qui se retrouve aussi de manière significative au niveau du col fémoral et de la hanche totale. De plus, en analyse multivariée, le taux de leptine se retrouve, ainsi que la durée de l’aménorrhée, comme des facteurs indépendants expliquant la variabilité de la DMO au niveau du rachis lombaire.
Ocytocine et leptine ouvrent peut-être la voie à une nouvelle compréhension du mécanisme physiopathologique de la maladie ostéoporotique et, à terme, à une amélioration de sa prévention et de son dépistage.
Dr Roseline Péluchon