Le professeur Stefan Goemare, doyen de l’Unité de l’Ostéoporose et de métabolisme osseux de l’Université de Gand, propose un zoom sur les aspects épidémiologiques de l’ostéoporose. Chaque année, l’on compte 80.000 nouvelles fractures en Belgique, dont 15 000 fractures de hanche, 2 000 fractures vertébrales, 12 000 fractures du poignet et 41 000 autres fractures (bassin, vertèbre, humérus, tibia, péroné, clavicule, omoplate, sternum, fémur). Comme l’indiquait le professeur Kauffman, ces nombres sont appelés à croitre dans les années qui viennent. L’étude des chiffres d’occurrences des fractures réalisée par Hilingsman et al (1) sur la base des chiffres disponibles en 2010 confirme, sans surprise, cette nette tendance à la hausse.
Ainsi, entre 2000 et 2007 le nombre total de fractures de hanche a augmenté de 9,1% au total. Quand on examine ces chiffres par genre, on constate une augmentation de 5,7% du nombre de fractures de hanches chez la femme et une augmentation de ….20,4% du nombre de fractures de hanche chez l'homme.
En réalisant des projections à partir de ces chiffres, tenant
compte même des progrès enregistrés auprès des femmes, Goemare
estime qu'on arrivera à 99.000 nouvelles fractures en 2025
(dont plus de 3.900 fractures de hanche supplémentaires
et 2.900 fractures vertébrales). Et l'on estime encore que ceci
engendrera une croissance de 21% des dépenses de soins
relatifs à ces fractures, portant le total des dépenses à 733
millions d'euros. Enorme…
Goemare propose aussi une analyse en termes de nombre de QALYS
(années de vie de qualité) perdue en conséquence des fractures
ostéoporotiques. Près de 10.000 QALYS chaque année, chez les hommes
seulement. Mais c'est traduite en nombre de morts qu'elle cause par
an que la maladie est la plus interpellante, puisque, selon
Arch Osteoporosis (2), les fractures auraient causé 979
décès en 2010, dont 502 pour les femmes et 477 chez les
hommes. Ceci confirme le constat selon lequel l'ostéoporose
tue plus chez les hommes.
Il s'agit donc de lutter contre cette maladie que le professeur Reginster n'hésite pas de qualifier de « désastre ». Goemare rappelle l'apport essentiel des technologies de mesure de la densité minérale osseuse par DEXA. Ces appareils ont joué un énorme rôle dans le dépistage et le suivi de l'ostéoporose chez la femme. Mais le professeur Goemare explique aussi qu'il existe de nouveaux outils pour se faire une meilleure idée du risque d'ostéoporose et encourage le médecin généraliste et spécialiste à utiliser ceux-ci.
L'outil FRAX est ainsi un outil particulièrement approprié pour mesurer le risque de fracture. Il a été développé par l'OMS pour évaluer les risques de fractures des patients. Il est basé sur des modèles individuels de patients qui intègrent les risques associés avec des facteurs de risques cliniques aussi bien que la Densité Minérale Osseuse (DMO) au col fémoral. Il importe maintenant que médecin, spécialiste et généraliste, s'intéresse maintenant à ce diagnostic…
Enquête IOF : les hommes sous-estiment largement leur risque d'ostéoporose
…Car le patient, lui, ne s'y intéressera pas! L'étude on-line réalisée dans 12 pays européens, et présentée en exclusivité le 15 octobre dernier, le confirme de manière éclatante. Mille patients ont été interrogés en Belgique. Il ressort de cette enquête que 76% des adultes interrogés sous-estimaient grossièrement leur risque, 69% des hommes de plus de 50 ans sous-estiment leur risque de développer une ostéoporose tandis que 25% des hommes interrogés ne se sont pas prononcés sur cette question, 94% des hommes de plus de 50 ans ne sont donc pas conscients de leur risque. Seuls 6% des hommes ont correctement estimé que l'ostéoporose affecte un homme sur 5 au-delà de 50 ans. Des chiffres qui indiquent l'importance à accorder à cette problématique.
Références :
(1) Hiligsmann et al. Arthritis Care Res (Hoboken)
2012;64:744-50
(2) Arch Osteoporos; 2013: 137.
Pierre de Nayer