L'amyloïdose des dialysés, dans laquelle le dépôt se forme à partir de bêta-2-microglobuline, est avant tout, une maladie ostéo-articulaire. Quelques patients ont cependant des lésions cutanées.
Papules lichénoïdes
Un homme de 50 ans, dialysé depuis 20 ans, avait depuis 5 ans une amyloïdose sévère des poignets, des mains et des grosses articulations.
Il n'avait pas de gammapathie monoclonale, ni d'autre cause d'amyloïdose systémique. Par contre, le taux sérique de bêta 2 microglobuline atteignait 44mg/l (normale inférieure à 3mg/l). Le diagnostic d'amyloïdose des dyalisés ne prêtait donc pas à discussion.
Il présentait sur l'abdomen et le bras droit des papules en têtes d'épingles, couleur chair, à la surface lisse, apparues très progressivement.
Histologiquement, ces éléments correspondaient à un dépôt éosinophile amorphe sous la basale de l'épiderme et des annexes et dans le derme papillaire. Ce dépôt, biréfringent en lumière polarisée, prenait le rouge congo. Il fixait un monoclonal anti-bêta 2 microglobuline, mais non les anticorps anti-chaînes légères des immunoglobulines anti-AA ou antikératine.
Des coupes témoins d'amyloïdose secondaire (AA) ou primitive (AL) n'étaient pas marquées par l'anti-bêta 2 microglobuline.
Les auteurs n'ont pas testé leur anticorps sur une coupe de lichen amyloïde, mais il faut reconnaître que la clinique et le contexte semblent suffire pour authentifier ces lésions papuleuses comme une manifestation cutanée spécifique originale de l'amyloïdose des dialysés.
Dépôts sous-cutanés, nodules, pigmentation
Les atteintes cutanées parlantes restent exceptionnelles dans ce type d'amyloïdose, contrairement à ce qui se passe dans l'amyloïdose associée à une dysglobulinémie ou un myélome (AL). L'amyloïdose des dialysés se manifeste surtout par un syndrome du canal carpien. On a décrit aussi des arthropathies destructrices, notamment axiales, des kystes osseux ou des fractures.
La bêta-2-microglobuline n'étant pas dialysable, le risque d'amyloïdose symptomatique augmente avec le volume des dépôts tissulaires au fil des années. Ainsi, après 12 ans de dialyse, plus de la moitié des patients auraient des signes neurologiques de syndrome du canal carpien.
L'existence d'un dépôt sous-cutané asymptomatique est au moins aussi fréquente, si on en croit les séries de ponctions à l'aiguille de la graisse abdominale.
Mais il n'existe que peu de publications rapportant des manifestations cliniques de cette atteinte cutanée. Taira en 1988 a signalé un cas d'hyperpigmentation après 11 ans de dialyse. L'histologie était comparable à celle du patient présenté ici.
Floege en 1989 et Sethi en 1990 ont décrit chacun un cas de nodules sous-cutanés des fesses, après 16 ans et 18 ans de dialyse.
A ces 2 types cliniques vient donc s'en ajouter un troisième : les papules lichénoïdes.
C'est manifestement l'ancienneté de la dialyse qui permet au dépôt de devenir parlant et les cas devraient donc se multiplier.
François Blanc
