Parodontite et diabète : une association bidirectionnelle

Parmi les multiples complications et comorbidités du diabète, celles qui affectent la sphère buccale ne sont pas les plus connues. Elles sont pourtant fréquentes et importantes au point que la maladie parodontale est souvent appelée la sixième complication du diabète. Le risque de perte de dents est majeur. Par ailleurs, la perte de substance gingivale que l’on observe en cas de périodontite modérée est 3 à 5 fois supérieure à celle que l’on observe en moyenne en cas d’ulcère de jambe, et peut atteindre 200 cm² en fonction de la sévérité de la parodontite. Le risque infectieux et donc d’aggravation du diabète est également majeur.

Parodontite et diabète, une association risquée

Chez les diabétiques, les parodontites sont non seulement plus fréquentes, mais aussi plus graves et plus étendues, la sévérité de l’atteinte étant fonction de l’âge du patient, de la durée du diabète et du contrôle de la maladie. A contrario, l’état du parodonte peut influencer la régulation de la glycémie, en augmentant l’inflammation par la production de substances pro-inflammatoires, et cela est aggravé par la présence d’autres facteurs de risque tels que l’hérédité, le tabagisme ou une hygiène dentaire inadéquate.

Un cercle vicieux dommageable

En pratique, l'augmentation de la glycémie chez le diabétique favorise la croissance des bactéries de la plaque dentaire. A cela s’ajoute la réduction du débit salivaire propre aux diabétiques, hyposialie qui va entraîner une augmentation de la masse bactérienne. Le diabète altère également la microcirculation au niveau des vaisseaux gingivaux avec formation de plaques athéromateuses qui diminuent l’afflux sanguin vers les tissus de soutien de la dent, aggravant l’évolution de la parodontite. Enfin, le diabète, maladie inflammatoire, augmente à ce titre la production de médiateurs inflammatoires favorisant la destruction du collagène, composant essentiel du parodonte, alors que les défenses locales sont amoindries par la baisse du nombre et de l’activité des lymphocytes NK.
Parallèlement, les glucides se lient par glycation aux protéines et aux lipides au sein du tissu collagène. Celui-ci, présent dans les vaisseaux, devient alors non fonctionnel et gonfle, altérant encore plus le flux sanguin. Les gencives sont moins vascularisées et dès lors plus sensibles aux bactéries qui favorisent l’inflammation des tissus gingivaux, augmentant encore la résistance à l’insuline et empêchant un bon contrôle de la glycémie. Le cercle vicieux est ainsi bouclé.
Ce mécanisme implique de référer systématiquement les patients diabétiques à un dentiste au moins une fois par an, mais justifie aussi que les dentistes renvoient chez le généraliste ou l’endocrinologue tous les patients souffrant de périodontite afin de dépister un éventuel diabète sous-jacent. Ceci est souligné dans une étude présentée par Hoe Kit Chee (Singapour), qui a montré que 5,4% des patients avec parodontite avaient un taux d’HbA1c compatible avec un diabète et 30,3% avec un prédiabète. L’incidence augmentait avec la sévérité de la parodontite.

Dr Dominique-Jean Bouilliez

Références
Chee HK, et coll. Periodontal disease is associated with increased risk of Diabetes and Pre-diabetes.
IDF Virtual Congress – 6-11décembre 2021

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Les réactions aux articles sont réservées aux professionnels de santé inscrits
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.

Réagir à cet article