À travers une étude menée conjointement par une équipe allemande de Francfort et un établissement britannique (Wolfson Center for Cognitive Neuroscience de Bangor), Archives of General Psychiatry consacre un article aux déficits perceptifs et mnésiques dans la schizophrénie débutante.
Pendant 3 ans et demi, les auteurs ont suivi une population de 17 adolescents étiquetés schizophrènes selon les critères du DSM-IV, comparativement à une population-témoin de même effectif. Ils se sont intéressés aux potentiels ERP (event-related potentials, potentiels corrélés à un stimulus, concernant ici l’attention visuo-spatiale) et à leurs différentes composantes dont la description comporte une lettre de polarité –P pour positif, N pour négatif– et sa latence en millisecondes après le stimulus : par exemple, P100 représente une composante positive, apparue après 100 ms. Objectif de ces recherches : affiner les données neurophysiologiques en rapport avec l’altération de la mémoire de travail (working memory) observée aux stades initiaux de cette psychose, un phénomène antérieur aux premiers signes cliniques de la maladie, et susceptible ainsi d’anticiper son diagnostic.
Les données exploitées incluent l’analyse des ERP (composantes P100, P370, P570…) à l’EEG et de l’imagerie fonctionnelle en résonance magnétique (fMRI). Les ERP P1 et P370 se révèlent réduits chez les patients, avec confirmation en imagerie fMRI de la baisse d’activité des aires visuelles, parallèlement à cet affaiblissement de la composante P1. Due elle-même à une irrigation sanguine moins performante, une moindre oxygénation locale entraînerait une réduction du nombre global des neurones expliquant à la fois le déficit constaté de la composante ERP P1 et la baisse d’activité de l’aire visuelle.
Ces travaux sont représentatifs d’un courant actuellement en plein essor dans la discipline où des données d’ordre neurophysiologique viennent enrichir la clinique, pour confirmer un diagnostic sur des critères objectifs et accroître sa précocité.
Dr Alain Cohen