Peut-on réduire l’effet placebo en psychiatrie ?

L’effet placebo est une constante dans les études cliniques, particulièrement en psychiatrie avec 25 à 35 % d’amélioration substantielle sous placebo qu’il s’agisse de patients atteints de  schizophrénie ou de dépression uni- ou bipolaire. Mais cet effet est très variable d’une étude à l’autre (de -19 % à +38 % par exemple dans la phase maniaque du trouble bipolaire). Pour mieux préciser le phénomène, une équipe internationale menée par Aysegül Yildiz (Izmir, Turquie) a effectué une vaste méta-analyse portant sur les antipsychotiques en phase aiguë maniaque. Trente-huit essais cliniques ont été retenus portant sur 56 comparaisons de 17 produits actifs versus placebo : sur les 5 929 patients recensés, 3 812 ont été soumis au traitement placebo.

Premier constat, l’importance de l’effet placebo a été du même ordre dans les études donnant des résultats positifs pour le produit étudié et celles qui ont donné des résultats négatifs (30,7 % et 31,6 % respectueusement) ; ce qui est ‘rassurant’ pour les produits étiquetés ‘efficaces’.

Deuxième constat, certains facteurs favorisent une augmentation de l’effet placebo : plus il y a de sites participants, plus l’effet placebo est important et donc l’écart avec l’effet thérapeutique faible. La présence de symptômes psychotiques est, à l’inverse, un facteur minimisant l’importance de l’effet placebo. Par ailleurs, si la sévérité de la phase aiguë maniaque est directement corrélée à l’importance de l’effet thérapeutique, l’effet placebo est indépendant de cette sévérité. Enfin, les sujets de sexe masculin sont moins sensibles à l’effet placebo, de même que les patients jeunes.

Ce qui permet aux auteurs de conseiller aux concepteurs d’études (sur la phase aiguë maniaque du trouble bipolaire) de limiter le nombre de sites et d’inclure des patients préférentiellement de sexe masculin peu âgés et présentant des symptômes psychotiques manifestes. De plus, veiller de manière « agressive » à ce qu’un nombre maximal de patients aille au terme de l’étude, augmente la fiabilité du résultat final.

Enfin, les grosses variations d’effet placebo entre sous-groupes de patients devraient conduire à prédéfinir une analyse séparée de ces sous-groupes et à augmenter la qualité du suivi dans chaque centre. Parallèlement, il serait intéressant de définir clairement un degré de sévérité minimal et maximal des maladies étudiées afin de réduire l’importance de l’effet thérapeutique observé chez les patients les plus atteints.

Dr Dominique-Jean Bouilliez

Références
Yildiz A et coll. : Placebo-related response in clinical trials for bipolar-mania: what is driving this
phenomenon and what can be done to minimise it ? 23rd European College of NeuropsychoPharmacology (ECNP) Congress (Amsterdam) : 28 août -1er septembre 2010.

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