PR : l’année du tocilizumab ?

J. Kremer et al. (1) ont rapporté les résultats intermédiaires (à un an) de l’étude LITHE (prévue sur 2 ans), étudiant en double insu versus placebo l’effet structural du tocilizumab (RoActemra®) chez 1 190 PR (393 sous MTX seul, 399 sous MTX + 4 mg/kg de TCZ, et 398 sous MTX + 8 mg/kg de TCZ), ainsi que l’amélioration du HAQ à cette date (initialement à 1,5 dans les trois groupes), appréciée par la diminution de l’aire sous la courbe (baisse de -144 dans le groupe 8 mg/kg, de -128 dans le groupe 4 mg/kg, versus seulement -58 dans le groupe placebo).

Les résultats ont été restitués en intention de traiter, le pourcentage de patients restant randomisés à un an n’étant plus que 73 %, 65 % et 41 % dans les groupes 8 mg/kg, 4 mg/kg et placebo respectivement, car en cas de réponse insuffisante aux 16e ou 28e semaines, les patients des groupes 4 mg/kg ou 8 mg/kg pouvaient être passés dans le bras 8 mg/kg, et ceux du bras 8 mg/kg bénéficier d’une autre thérapeutique ; une méthodologie qui brouille un peu l’analyse des résultats. Les pourcentages d’ACR20 étaient à un an dans les groupes 8 mg, 4 mg et placebo de respectivement : 56 %, 47 % et 25 %, les pourcentages d’ACR50 de 36 %, 29 % et 10 %, et les pourcentages d’ACR70 de 20 %, 16 % et 4 %. Ces différences ne paraissent pas aussi marquées que dans les études initialement faites au Japon où la molécule avait été développée. Toutefois, et du fait en partie de l’effet marqué du TCZ sur les scores de VS et de CRP, et des changements de groupes à partir de la 16e semaine en cas de réponses insuffisantes, les proportions de patients atteignant le seuil de rémission de DAS-28 (< 2,6) étaient nettement plus importants sous TCZ : 47 % (8 mg/kg) et 30 % (4 mg/kg), versus seulement 8 % dans le groupe placebo. Les scores structuraux étaient initialement assez bas malgré l’ancienneté de ces PR (29 unités Genant), traduisant sans doute le caractère assez peu destructeur des PR de ces patients, car à un an, seuls 33 % de ceux du groupe placebo avaient eu de nouvelles lésions, la progression moyenne dans ce sous-groupe n’ayant été que de 0,7 ± 1,9. Cette progression était toutefois encore moindre dans les groupes traités par TCZ, de seulement 0,2 ± 0,9 pour les deux posologies. Le pourcentage de patients n’ayant pas progressé étaient de 85 % dans le groupe traité par 8 mg/kg, et de 81 % dans le groupe traité par 4 mg/ kg. Le pourcentage de patients sous corticoïdes et la dose moyenne de corticoïdes reçus par ces patients n’ont pas été précisés, mais la posologie devait rester identique durant toute la durée de l’étude. La tolérance était à cette date comparable à celle des études précédentes, les taux d’infections graves allant de 1,5 % dans le groupe contrôle à 3 % dans le groupe TCZ à 8 mg/kg.

À noter toutefois 6 réactions allergiques (4 anaphylaxies et 2 réactions d’hypersensibilité), concernant 1 % des patients traités par TCZ. L’analyse rétrospective de quatre études consacrées à l’effet du TCZ (TOWARD, OPTION, RADIATE, et AMBITION) a mis en exergue le fait que le TCZ avait toujours normalisé la CRP en deux semaines, le différentiel d’avec le placebo se faisant aussi sentir cliniquement dès ce moment (2).

L’effet du TCZ paraît par ailleurs comparable, que les PR aient échappé à un, deux ou trois anti-TNF. En effet, le pourcentage de patients pour lesquels une rémission (score DAS-28 < 2,6) a pu ensuite être obtenu était comparable dans ces trois études : 31 %, 31 %, et 25 % respectivement (3). M.C. Genovese et al.(4)  ont rappelé les résultats de l’étude AMBITION ayant comparé le TCZ en monothérapie au MTX (posologies croissantes de 7,5 à 20 mg/semaine) chez des pa-tients n’ayant pas encore résisté à un traitement de fond. Dans le sous-groupe dont la PR évoluait depuis moins de 2 ans, le TCZ a fait nettement mieux que le MTX, induisant une rémission DAS-28 (< 2,6) chez 42 % des patients, alors que ceci n’était le cas que de 18 % de ceux sous MTX seul. Il en était de même dans le sous-groupe de ceux dont la PR avait plus de 2 ans d’ancienneté, même si les taux de rémissions étaient alors plus faibles dans les deux bras de traitement (28 % sous TCZ et 7 % sous MTX).

Le taux d’anticorps anti-TCZ est enfin apparu assez faible (de 0,5 % à 3,6 %) au terme de 36 semaines de traitement par TCZ dans les quatre études (5). Toutefois, il a été rappelé que le TCZ élève le taux de cholestérol (HDL comme LDL) ainsi que les triglycérides et les apolipoprotéines A1 et B, les incidences à long terme de ces élévations parallèles, notamment sur la fonction cardiaque, restant encore inconnues (6). Un avis spécialisé et/ou l’introduction d’une statine pourraient être nécessaires en cas de troubles métaboliques significatifs.

 

Dr J-M.Berthelot

 

1. Kremer J et coll. : Tocilizumab Inhibits Structural Joint Damage in Rheumatoid Arthritis Patients with an Inadequate Response to Methotrexate: The LITHE Study
2. Smolen JS : Tocilizumab Treatment Results in Rapid Improvements in the Signs and Symptoms of Moderate-to-Severe Rheumatoid Arthritis in Four Patient Populations with Different Prior Therapy Exposure
3. Emery P et coll. : Patients Achieve Significant Improvement in Rheumatoid Arthritis (RA) Outcomes with Tociluzumab (TCZ) Regardless of Prior Inadequate Response (IR) to TNF Antagonists
4. Genovese MC et coll. : Tociluzumab (TCZ) Monotherapy Improves Rheumatoid Arthritis (RA) Outcomes Regardless of Disease Duration
5. Ramos-Remus C et coll. : Tociluzumab (TCZ) Monotherapy Improves Rheumatoid Arthritis (RA) Outcomes Regardless of Disease Duration
6. Genovese MC : Lipid and Inflammatory Biomarker Profiles in Patients Receiving Tocilizumab for Rheumatoid Arthritis: Analysis of Five Phase 3 Clinical Trials

ACR/ARHP Scientific Meeting 2008 (San Francisco, USA) : 24-29 octobre 2008.

Copyright © Len medical, Rhumatologie pratique, décembre 2008

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