Prévenir la migraine chez l’enfant : un casse-tête !

Le Dr Jean-Christophe Cuvellier a présenté à l’AFPA une mise au point sur le traitement de la migraine chez l’enfant. Il souligne l’importance de la prise en charge globale « bio-psycho-sociale » de l’enfant, dans un contexte où l’efficacité des traitements préventifs médicamenteux est incertaine.

L’objectif du traitement de la crise est d’obtenir un soulagement à 2 heures. Les deux médicaments ayant le plus haut niveau de preuve sont l’ibuprofène (10mg/kg) et le sumatriptan en spray nasal (10 ou 20mg). En France, le sumatriptan est le seul triptan ayant une autorisation de mise sur le marché (AMM) pédiatrique (à partir de 12 ans). Il bénéficie d’une excellente tolérance, et est efficace dans 65 à 85 % des cas selon les études. L’almotriptan, le zolmitriptan et le rizatriptan sont également efficaces chez l’adolescent mais n’ont pas reçu d’AMM. Par ailleurs, il ne faut pas oublier les mesures non pharmacologiques (règles d’hygiène de vie, bonne hydratation, limitation des facteurs de stress, allègement de l’emploi du temps…).

Les données disponibles sont moins nombreuses concernant le traitement préventif. Alors que le topiramate (25 à 100mg/j) et la flunarizine (5mg/j) semblaient faire consensus, une étude multicentrique de 2017 évaluant l’efficacité du topiramate (2mg/kg/j) et de l’amitryptiline (1mg/kg/j) n’a pas retrouvé de supériorité de ces traitements par rapport au placebo (elle a été arrêtée prématurément en raison d’une tentative de suicide dans le groupe traitement) (1). En l’état actuel des connaissances, ce sont donc les prises en charges non médicamenteuses qui sont privilégiées (biofeedback, training autogène, auto-hypnose, thérapie cognitivo-comportementale…). La prise en charge de la migraine chronique (plus de 15 jours/mois pendant plus de 3 mois) se base sur les mêmes outils. Elle devra s’attacher entre autres à prévenir la survenue d’un abus d’antalgiques. Dans tous les cas, le traitement doit être régulièrement réévalué en fonction de l’efficacité (nombre de jours mensuels de migraine) et de la tolérance.

Dr Alexandre Haroche

Références
1. Powers SW, Coffey CS, Chamberlin LA, Ecklund DJ, Klingner EA, Yankey JW, et al. Trial of amitriptyline, topiramate, and placebo for pediatric migraine. N Engl J Med 2017 ; 376 (2) : 115–124.
Cuvellier JC : Neurologie : prise en charge des « migraines. Congrès de l’Association Française de Pédiatrie Ambulatoire (Lille) : 23-24 juin 2017.

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Vos réactions (2)

  • Et les facteurs hygiéno-diététiques ?

    Le 20 juillet 2017

    Le traitement de la migraine de l'enfant est peut-être un casse-tête, celui du diagnostic de la migraine chronique de l'enfant l'est tout autant !
    La classification internationale des céphalées de 2013 définit la migraine chronique comme l'association de céphalées migraine "like " avec des céphalées de tension"like " 15 jours par mois pendant au moins 3 mois, vous avez remarqué le "like " difficile alors de faire la différence avec des céphalées de tension chroniques quotidiennes puisque dans cette définition les migraines ne sont pas forcément typiques c'est la raison pour laquelle le diagnostic de migraine chronique de l'enfant est soit sous évalué soit sur diagnostiqué et, en tout cas, difficile.
    En ce qui concerne le traitement, bien d'accord avec ce qui est proposé pour le traitement de la crise migraineuse. En revanche, pour le traitement de fond, je mettrais un petit bémol. En effet, si l'on admet bien le rôle provocant chez l'enfant du stress et de l'effort physique, on insiste moins en France sur les facteurs hygiéno-diététiques. On passe vite dessus alors que le surpoids, souvent rencontré, chronicise la migraine et rien sur "l'allergie alimentaire" (pour faire court) dans la littérature du 21éme siècle. Rien non plus sur le rôle des régimes hyperlactés dont, fort opportunément, on a cité le rôle néfaste dans la migraine lors d'un émission TV traitant du sujet, mais l'intervenant était allemand! En France, si vous incriminez le lait dans la migraine vous êtes pour les experts adeptes de la théorie du complot et pourtant l'expérience quotidienne est là pour témoigner…
    Hervé Isnard (Lyon)

  • Des traitements trop vite écartés

    Le 23 juillet 2017

    On peut s'étonner de proposer comme traitement de fond de la migraine la flunarizine qui est considérée comme un neuroleptique "caché", : il est contre indiqué en cas de syndrome extra pyramidal, donc un neuroleptique à même de causer à terme le risque, même s'il est minime, de dyskinésies tardives définitives, le jeu en vaut-il la chandelle ?
    D'autre part l'AMM de la flunarizine concerne les enfants de plus de 12 ans et quid des plus jeunes? L'AMM demande en outre instamment chez l'enfant, sans doute en raison du risque dyskinésies, une durée de traitement n'excédant pas 6 mois, un peu court pour une affection dont la durée moyenne est d'au moins 10 ans!
    L'épitomax et l'amytriptiline ne font pas leur preuve face au placebo, toujours l'évidence based medicine mise en avant, soit mais dans la pratique quotidienne comment ne peut-on pas regretter la déqualification de la Di Hydro Ergotamine, le Séglor pour ne pas le nommer, pour SMR insuffisant alors qu'il soulageait prés de 50% des enfants, et dans cet article pourquoi ne pas citer l'Oxetorone (Nocertone) aini que le propranolol(Avlocardyl) qui rendent, en dehors de l'inévitable evidence based medicine (je rappelle qu'en anglais évidence= preuve) de grands services quotidiennement en sachant qu'il est préférable d'éviter le propranolol chez l'enfant sportif , le footballeur par exemple, en raison d'une non compliance cardiaque à l'effort physique.
    Vous êtes- vous demandé pourquoi si peu de réactions à cet article concernant un thème important de la pédiatrie et de la neuropédiatrie,? La peur de ne pas contrer les idées reçues et les dogmes? Sans doute.

    Dr Hervé Isnard, neuropédiatre libéral
    Lyon


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