Quel diagnostic biologique de maladie de Lyme ?

La borréliose de Lyme est due à des spirochètes du genre Borrelia : les espèces pathogènes responsables sont regroupées dans le complexe Borrelia burgdorferi sensu lato (B. burgdorferi sl). En Europe, on trouve essentiellement : B. burgdorferi sensu stricto (B. burgdorferi ss), B. garinii et B. afzelii. Après une piqûre de tique infectante, 95 % des sujets font une séroconversion sans signes cliniques. Seuls 5 % des sujets développent une infection active qui peut évoluer schématiquement en 3 phases :

1/ une phase précoce localisée avec un érythème migrans (EM) qui peut, en l’absence de traitement, évoluée en un

2/ stade précoce disséminé avec atteinte neurologique, articulaire, lymphocytome, cardiaque ou oculaire.

3/ Enfin, il existe une phase tardive (toujours en l’absence de traitement) avec une atteinte cutanée (Acrodermite Chronique Atrophiante [ACA]), une atteinte neurologique et une atteinte articulaire chronique

Techniques diagnostiques : le diagnostic biologique direct

L’examen direct est difficile à cause de la rareté des spirochètes qui, de plus, sont intra-tissulaires rendant cet examen inadapté sauf en cas de fièvres récurrentes.

La culture est l’examen de référence mais elle est réservée aux laboratoires spécialisés avec des milieux de culture spécifiques. Il faut attendre 2 à 8 semaines pour avoir les résultats.

La PCR est actuellement réalisée en milieu hospitalier avec des réactifs « maisons ». Quelques réactifs commerciaux ont été développés, mais peu de données sont disponibles. La PCR a une bonne sensibilité sur les lésions cutanées et sur le liquide synovial et permet de typer l’espèce en cause. Mais la sensibilité est décevante dans le liquide céphalorachidien (LCR) (< 10 à 30 %), et quasi nulle dans le sang. Par ailleurs, une positivité ne signe pas forcément une infection active.

Diagnostic biologique indirect : la sérologie si souvent décriée

La sérologie doit se faire en 2 temps. On débute avec une 1ère technique dont on attend une sensibilité maximale au détriment de la spécificité (pour le réactif de 1ère intention, la spécificité est ≥ 90 %). La première technique (en général par Elisa) doit ensuite être confirmée par un test d’immuno-empreinte (western-blot / immuno-dot) pour améliorer la spécificité (pour le réactif d’immuno-empreinte, la spécificité est ≥ 95 %). De nombreux tests d’immuno-empreinte sont commercialisés afin d’augmenter leur spécificité. A titre d’exemple, B. afzelii / B. garinii sont inclus dans 93 % des tests sur le marché français. L’immuno-empreinte n’étant globalement pas plus sensible que l’Elisa, il n’y a donc pas d’indication à la faire en première intention.

Les faux positifs du test de 1ère intention sont liés aux nombreuses réactions croisées avec d’autres agents infectieux ou la présence d’une pathologie auto-immune.

Il est inutile de faire une sérologie en cas d’EM ou en cas de piqûre de tiques car les anticorps apparaissent tardivement (au moins 3 semaines) entrainant un retard diagnostic. En cas de doute diagnostique, ne pas demander de sérologie mais faire une recherche éventuellement directement par PCR.

En cas d’ACA, les sensibilités et spécificités des IgG et des IgM sont respectivement de 99 %  et 97 % et de 18 % et 97 %.

D’après l’expérience du Centre National de Référence (CNR) des Borrelia, les IgG sont positifs dans 75 à 95 % des cas de neuroborréliose selon les kits.

En cas de suspicion de neuroborréliose, il faut réaliser une ponction lombaire qui montrera une hyperproteinorachie modérée ainsi qu’une sérologie positive (mais qui peut manquer au stade très précoce de la neuroborréliose).

Les limites des tests sérologiques

On observe une positivité des anticorps dans les arthrites de Lyme mais ce ne sont ni des marqueurs diagnostiques ni des marqueurs pronostiques. Des IgG positifs peuvent signer une cicatrice ancienne, tout comme une possible ré-infection sans IgM. Par ailleurs, un traitement précoce peut entrainer une augmentation transitoire des IgM sans séroconversion (c'est-à-dire sans apparition des IgG).
 
Une sérologie positive ne signifie pas sérodiagnostic
. Une sérologie positive indique uniquement un contact avec la Borrelia. Une sérologie positive ne permet pas de distinguer une infection active d’une infection ancienne (traitée ou non) ou asymptomatique.

La persistance des anticorps ne signifie pas persistance de l’infection.

Les anticorps persistent après traitement bien conduit et efficace pendant plus de 10 ans en IgM ou IgG entraînant un risque de retraitement par excès. La surveillance post-thérapeutique repose ainsi sur la clinique et non sur la sérologie.

Quelle valeur des tests ?

Dans les zones de forte prévalence de borréliose (Alsace, Limousin), où la séroprévalence est de 10 % et la prévalence de 1 % (établie selon des critères épidémiologiques-InVS), la spécificité analytique des tests sérologiques est de 95 %, la sensibilité de 98 %, la valeur prédictive négative (VPN) de 99,97 % et la valeur prédictive positive (VPP) de 16,5 %.

Dans les zones de faible prévalence, où la séroprévalence est de  2 % et la prévalence 0,2 %, la sensibilité analytique est de 95 %, la sensibilité de 98 %, la VPN de 99,99 % et la VPP de 3,78 %. Un test positif n’est pas synonyme de maladie.

Et les autres tests ?

- Le Test Elisa pour la détermination quantitative de CXCL13 dans le LCR dans les neuroborrélioses présente une faible spécificité (neuro-syphillis, méningites carcinomateuses, méningites virales).
- Les tests de transformation lymphocytaire (LTT) ont été évalués et standardisés pour la tuberculose avec mise en évidence d’une synthèse d’IFNγ après stimulation des lymphocytes T par des protéines de mycobactéries. Un test de ce type est actuellement commercialisé pour Borrelia, l’Elipsot® avec seulement 3 études publiées dont une seule avec cas/témoins montrant une sensibilité de 36 % et une spécificité de 82 %.
- Le dosage des lymphocytes NK CD57 a fait l’objet de 4 études, dont 3 de la même équipe avec des résultats en contradiction avec le 4e travail.

Pour conclure

Au final, pour poser un diagnostic de maladie de Lyme, il faut tenir compte de l’épidémiologie (contexte, piqûre de tique, zone d’endémie), de la biologie (sérologie sanguine, ponction lombaire, ponction articulaire), de la clinique (manifestations dermatologiques, neurologiques, articulaires en fonction des 3 phases : primaire, disséminée précoce, disséminée tardive).

Il n’existe pas de marqueur d’infection active à ce jour.

On ne peut pas différencier biologiquement une infection asymptomatique d’une cicatrice sérologique et il n’existe pas (encore ?) de marqueur de maladie persistante.
 

Dr Sylvie Coito

Référence
Jauhlac B : Diagnostic biologique de la maladie de Lyme en 2018. 52e journées de biologie praticienne (Paris) : 7 - 8 décembre 2018.

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