Quels conseils nutritionnels en cas de pathologie inflammatoire ?

Après une matinée consacrée aux choix alimentaires, l’après-midi de la Journée annuelle de l’Institut Benjamin Delessert 2023 était consacrée à des aspects plus pratiques portant sur les recommandations nutritionnelles notamment en cas de rhumatisme inflammatoire ou de NAFLD.

Rhumatismes inflammatoires chroniques : prendre en compte les comorbidités

Les RIC (rhumatismes inflammatoires chroniques) touchent environ 600 000 individus en France et regroupent principalement la polyarthrite rhumatoïde (PR), la spondylarthrite (SA) et le rhumatisme psoriasique (RP). Le pronostic des patients s’est considérablement amélioré ces deux dernières décennies avec la mise sur le marché des biothérapies. Malgré cela des symptômes peuvent persister et les patients sont tentés de « contrôler » leur maladie par eux-mêmes. 25 % d’entre eux déclarent que certains aliments améliorent ou au contraire exacerbent ces symptômes. Ils sont alors tentés d’initier des régimes d’exclusion au risque d’abandonner leur traitement et aggraver leur risque de comorbidités (ostéoporose, maladies cardiovasculaires). Dans un souci d’accompagner les patients et de leur fournir des informations scientifiques validées, la Société Française de Rhumatologie (SFR) a émis des recommandations sur l’alimentation des patients souffrant de RIC (1). Ce travail a été conduit et validé par des rhumatologues ainsi que des représentants de la société française de nutrition (SFN), la société francophone de nutrition clinique et métabolique (SFNCM), l’association française d’étude et de recherche sur l’obésité (AFERO), l’association française des diététiciens nutritionnistes (AFDN) ainsi que des associations de patients. Claire Daien (CHU Montpellier) a présenté les principales recommandations :

·Les mesures alimentaires ne doivent pas se substituer au médicaments anti-rhumatismaux et doivent être associées à une activité physique régulière.

·Les régimes d’exclusion (végétarien/végétalien, sans gluten, Seignalet, Kousmine) ne sont pas recommandés car il n’existe aucune preuve solide de leur efficacité et des données suggèrent même un effet délétère sur le risque fracturaire pour les régimes sans laitage ou cardiovasculaire pour les régimes sans gluten.

·Le jeûne prolongé (10 jours) aurait un effet sur les symptômes articulaires mais qui ne se maintient pas dans le temps après la reprise de l’alimentation.

·Le régime type méditerranéen et la consommation ou supplémentation en oméga 3 (EPA+DHA>2 g/jour) ont montré des effets positifs sur les douleurs articulaires et la raideur articulaire matinale, principalement dans la PR mais aussi sur le risque cardiovasculaire.

·Le régime méditerranéen n’a pas montré d’effet sur les destructions articulaires.

·En cas d’obésité ou de surpoids associé à un RIC, la perte de poids (accompagnée par un spécialiste) a un effet positif sur les symptômes articulaires et sur la réponse aux traitements.

La consommation de certaines épices (safran, gingembre, sésamine, cannelle) pourrait avoir des effets bénéfiques sur la PR sans qu’il n’y ait de preuve solide pour les recommander en pratique courante. En l’absence de preuves, les probiotiques non plus ne peuvent être recommandés en routine mais Claire Daien insiste sur le fait de rester ouvert et à l’écoute des patients et de leurs ressentis.

NAFLD : la nutrition et l’activité physique au cœur de la prise en charge

Communément appelée la « maladie du foie gras non alcoolique », la NAFLD (Non-Alcoholic Fatty Liver Disease) est un « continuum de lésions hépatiques allant de la stéatose simple à la NASH (Non-Alcoholic Steatohepatitis) observée chez 20 % des patients ». Environ 220 000 français (métropole) auraient une NASH avec une pré-cirrhose ou une cirrhose. Rodolphe Anty, hépatologue au CHU de Nice en a décrit l’épidémiologie, la physiopathologie et les nouvelles méthodes de dépistage non invasif. Les mesures hygiéno-diététiques représentent une part importante de la prise en charge de ces patients et les conseils peuvent également être distillés à leurs descendants qui sont potentiellement soumis aux mêmes facteurs « obésogènes » (génétique, épigénétique, environnemental) (2). Les conseils diététiques doivent être accompagnés d’une diminution de la sédentarité et d’une augmentation de l’activité physique. L’APA (activité physique adaptée) peut éventuellement être prescrite en fonction du profil et de la motivation du patient.

Delphine Tran, diététicienne à Nice, a poursuivi la présentation par quelques conseils pour les patients atteints de NAFLD. Afin de poser un diagnostic diététique précis, il est important d’identifier les forces et faiblesses du patient via notamment un interrogatoire et entretien motivationnel. L’objectif de la prise en charge est d’améliorer la qualité nutritionnelle et de trouver un rythme et une alimentation adaptés à chaque individu. Les produits riches en fibres doivent être privilégiés et les produits trop gras et trop sucrés, édulcorés et/ou ultra-transformés à limiter. Il convient également de d’augmenter sa consommation de protéines végétales (légumineuses, fruits à coque), de limiter la consommation de viande à 500 g/semaine et de poisson gras à une fois par semaine. Les aliments hépato protecteurs comme le café et le thé vert peuvent être conseillés. Le régime méditerranéen traditionnel peut être promu car il est associé à une préservation de la santé en général. La consommation d’alcool doit être déconseillée chez ces patients.

La journée annuelle s’est achevée par la présentation d’Antoine Garnier-Crussard, médecin gériatre (Hospices Civiles de Lyon) et chercheur au Centre Mémoire de Ressources et Recherche (CMRR) de Lyon, qui a abordée le rôle de l’alimentation, en prévention primaire, secondaire et tertiaire de la maladie d’Alzheimer, notamment des relations bidirectionnelles entre le statut nutritionnel et l’évolution de cette pathologie

Pour consulter les résumés des intervenants : https://www.institut-benjamin-delessert.net/wp-content/uploads/2023/01/Dossier_JABD_20230130_WEB.pdf

Plus d’informations sur l’Institut : https://www.institut-benjamin-delessert.net/

Dr Dounia Hamdi

Références
(1) Daien C, et coll. Dietary recommendations of the French Society for Rheumatology for patients with chronic inflammatory rheumatic diseases. Joint Bone Spine. 2022 Mar;89(2):105319. doi: 10.1016/j.jbspin.2021.105319.
(2) European Association for the Study of the L, European Association for the Study of D, European Association for the Study of O. EASL-EASD-EASO Clinical Practice Guidelines for the management of non-alcoholic fatty liver disease. J Hepatol 2016;64:1388–402. https://doi.org/10.1016/j.jhep.2015.11.004.

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