Le traitement chirurgical des stérilités liées aux syndromes des ovaires polykystiques est classiquement proposé quand les inductions de l'ovulation échouent, ou ne peuvent être conduites à leur terme en raison d'un risque élevé d'hyperstimulation. La résection ovarienne partielle par laparotomie peut désormais être remplacée par des techniques clioscopiques moins invasives, résection ou électrocoagulation. Elles n'imposent qu'une hospitalisation de 24 h et, en règle générale, n'entraînent pas de complications. En particulier, il n'a pas été observé d'adhérences péri-ovariennes dans les suites à distance, à l'occasion de césariennes.
50% de grossesses post-résection
L'équipe romaine de Campo et coll. a étudié l'efficacité de la résection ovarienne chez 23 femmes présentant un syndrome des ovaires polykystiques documenté, désirant une grossesse depuis au moins 2 ans (moyenne 3,2 ans), et chez lesquelles l'induction hormonale de l'ovulation avait échoué.
Chez ces patientes d'âge moyen 28 ans, le diagnostic d'ovaires polykystiques avait été posé devant l'association d'une aménorrhée secondaire (8 cas) ou d'une spanioménorrhée (15 cas) ; d'un rapport LH/FSH > 2 ; d'une élévation des androgènes ovariens (testostérone et delta-4 androstènedione) ; et de la présence d'ovaires polykystiques à l'échographie, ou d'ovaires lisses à coque épaisse à la laparoscopie.
Les couples correspondants ne présentaient pas d'autre cause évidente d'infertilité (spermogramme, hystérosalpingographie et prolactinémie normaux). Chez toutes les patientes, au moins 3 tentatives d'induction de l'ovulation par un protocole standard de citrate de clomiphène n'avaient pas été suivies de grossesse, et chez 5 d'entre elles, 27 autres tentatives, soit avec FSH, soit avec une association HMG-HCG, soit sous pompe à la GnRH après freinage par GnRHa, avaient été un échec. Ces tentatives d'induction hormonale de l'ovulation (133 cycles) avaient été suivies d'ovulation dans 14% des cas. Le traitement chirurgical a consisté en une résection ovarienne partielle, soit par biopsies multiples, soit d'un fragment de 0,5x1x1,5 cm.
Les résultats de l'étude portent sur 64 cycles consécutifs à l'intervention. Celle-ci a été suivie d'ovulations spontanées dans 56% des cas, et 13 grossesses ont été obtenues chez ces 23 couples : 10 grossesses spontanées, et 3 grossesses après traitement de l'anovulation persistante par le citrate de clomiphène (39 cycles, ovulatoires dans 51,3% des cas). Le cycle suivant la clioscopie, 43% d'ovulations (entre le 16e et le 29e jour) ont été observées, et 2 grossesses en ont résulté. A l'opposé, 3 patientes sont restées en aménorrhée malgré la
laparoscopie.
Mécanisme du succès : indéfinissable ?
Le succès de la résection ovarienne dans les ovaires polykystiques est habituellement attribué à la réduction "mécanique" du pool des cellules ovariennes sécrétant une quantité excessive d'androgènes aromatisables, sous l'impulsion de taux de LH trop élevés et dans un rapport avec la FSH inadéquat. Dans ces affections primitivement hautes, il ne s'agit que d'un traitement symptomatique dont l'effet s'épuiserait après quelques cycles.
Etayant ces hypothèses, les auteurs rapportent une diminution significative des androgènes ovariens au 4e jour après la résection, comme cela a été signalé avec les autres techniques de résection ovarienne. Cet abaissement est associé à une élévation de la FSH dans le sous-groupe le plus sensible à ce traitement. Par contre, les différents dosages des gonadotrophines étudiés (taux de base et sous GnRH, étude de la pulsatilité sur 4 h avec un prélèvement toutes les 10 mn) ne sont pas affectés par le traitement chirurgical. On peut regretter de ne pas disposer des courbes individuelles de pulsatilité pour pouvoir juger d'un éventuel effet du traitement dans certains cas, à travers la modification du feed-back des hormones sexuelles (et de l'inhibine ?) sur l'axe hypothalamo-hypophysaire.
Des indications qui restent floues
Paradoxalement, il n'existe aucune corrélation entre la diminu-tion des androgènes après la clioscopie et le taux d'ovulation ou de grossesse. Cela souligne probablement la grande hétérogénéité du syndrome des ovaires polykystiques (en dehors du cadre assez stéréotypé du Stein-Leventhal). On peut regretter que la présentation des résultats de ce travail fasse obstacle à la définition des groupes de sujets les plus susceptibles de bénéficier d'une résection ovarienne partielle. En effet, les patientes ne sont pas catégoriées en fonction de l'importance de leur tableau clinico-biologique ou du nombre d'échecs de l'induction hormonale de l'ovulation, et les aménorrhées ne sont pas classées en fonction de leur profondeur.
Une lecture attentive des résultats semble montrer que les femmes qui ont le plus bénéficié de la résection ovarienne (ovulation, voire grossesse dès le premier cycle post-chirurgical) sont celles qui avaient initialement les taux d'androgènes (delta-4 androstènedione à 1,83 ng/ml) et de LH (11,90 versus 17,5 pour l'ensemble du groupe d'étude) les moins élevés. Cela suggère qu'elles présentaient les formes les moins sévères de polykystose ovarienne, et rien dans ce travail ne permet d'écarter l'hypothèse qu'elles auraient pu obtenir une grossesse si les tentatives hormonales d'induction de l'ovulation avaient été poussées au-delà du troisième cycle sous citrate de clomiphène.
Pascale Simon
Campo S. et coll. : "Endocrine changes and clinical outcome after laparoscopic ovarian resection in women with polycystic ovaries". Hum. Reprod., 1993 ; 8, 3 : 359-363.
SIMON PASCAL