Romanesque

Paris, le samedi 26 septembre 2015 – Les médecins peuvent souvent hanter les romans : personnages secondaires incarnant la sagesse, héros tourmentés par les difficultés passionnelles du métier, hérauts malgré eux des plus mauvaises nouvelles. La rentrée littéraire 2015 ne fait pas exception et donne une place importante aux personnages en blouse blanche, qui souvent sont campés en anti héros. Lucien, le jeune interne du premier roman d’Eric Anglade (lui-même médecin radiologue) aurait pu avoir tout du jeune premier, sauvant de leurs pires tourments ses patients admis en psychiatrie. Cependant, sa belle assurance s’érode quand son maître lui déclare son désamour pour la psychiatrie publique. Seul, sans repère, Lucien va assister avec une jalousie morbide à l’ascension d’une jeune rivale aussi belle que brillante. Dès lors, il projette les pires stratagèmes pour détrôner sa concurrente. Les jeux de miroir créés par l’auteur évoquent en partie la propre vie d’Eric Anglade, qui a vu sa carrière débutante basculer lorsqu’il fut victime d’un accident de voiture.

Naissance du printemps

La même dualité se retrouve dans le personnage de Marie Wagner, le médecin que rencontre Emilienne, le personnage principal du nouveau roman d’Anne Berest Recherche femme parfaite. Alors qu’Emilienne, planquée derrière son appareil photo, chercher à construire une exposition autour de l’image de la femme, son entrevue avec Marie Wagner semble illustrer de façon singulière la complexité de l’âme et de l’apparence. Car derrière sa blouse et sa lisse apparence de veuve de pasteur, Marie Wagner se décrit comme un véritable " diable". Autour de ce personnage et de nombreux autres portraits de femmes, Anne Berest construit un roman tourbillonnant où les histoires se répondent en de multiples jeux de miroir, jusqu’à peut-être construire une image fragmentée de la romancière elle-même.

Crépuscule d’automne

Doit-on également voir dans François, le héros du dernier roman de Tillinac comme une ombre de l’écrivain ? Sans doute, à travers ce personnage de médecin entré dans la soixantaine, encore dynamique mais s’interrogeant plus que jamais sur le temps, Tillinac a souhaité évoqué les feux de l’automne. Son roman est en effet une vibrante histoire d’amour entre le médecin de campagne, faussement désabusé et légèrement détaché de tout et Hélène qui tient une galerie d’art à Blois et qui va trouver dans cette passion inattendue la libération d’une petite vie étriquée de province. La plume de Tillinac nous offre une belle promenade amoureuse qui n’échappe pas aux interrogations sur la vieillesse et le droit de détruire (pour reconstruire) une vie, le soir venu.

Romans :
Le dernier garde fou, d’Eric Anglade, DuB Editions, 200 pages, 15 euros
Recherche femme parfaite, d’Anne Berest, Grasset, 304 pages, 19 euros
Retiens ma nuit, Denis Tillinac, Plon, 169 pages, 17,90 € 

Aurélie Haroche

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