Quels sont les « bons » seuils transfusionnels pour l’indication d’une transfusion de concentrés de globules rouges ? C’est à cette question que s’est efforcé de répondre un panel de professionnels, comprenant les Dr O. Garraud, de l’Établissement français du sang Auvergne-Loire, G. Andreu, de l’Institut national de la transfusion sanguine, et JM Boiron, de l’Établissement français du sang Aquitaine.
La tolérance clinique et les comorbidités : des facteurs déterminants
De ce débat, il ressort que si le seuil transfusionnel
consensuel général pour l’indication d’une transfusion de
concentrés de globules rouges est de 8 g/dl, il reste conditionné
par différents facteurs, notamment : la tolérance clinique, la
rapidité d’installation de la déglobulisation et les comorbidités
associées. Parmi ces dernières, l’accent est mis sur l’existence ou
le risque d’une pathologie coronarienne, le contexte
post-chimiothérapique, l’existence d’une thalassémie majeure ou
d’une autre anémie hémolytique.
Une bonne tolérance clinique, en général signe d’une installation
progressive de l’anémie, observe le Dr JM. Boiron, peut
permettre de différer une transfusion, mais il rappelle aussi
que cette tolérance n’est pas évaluable sous anesthésie ou
lorsque la conscience est altérée.
Chez le patient ayant une comorbidité, note le Dr JM. Boiron, le
seuil transfusionnel pour une transfusion de concentrés de globules
rouges est modifié, avec une prescription des culots globulaires
pour des valeurs supérieures. Il cite l’exemple des ß-thalassémies
homozygotes majeures (10 g/dl chez l’enfant, 8-9 g/dl chez
l’adulte), et d’anémies hémolytiques autres, à ne transfuser qu’en
cas de mauvaise tolérance réelle ou prévisible. Et le Dr O. Garraud
cite l’exemple de la post-chimiothérapie intensive, où le seuil
peut être relevé à 10 g/dl chez le patient âgé de plus de 60-65
ans.
En pratique, les auteurs s’accordent à considérer qu’« il est
exceptionnel de devoir transfuser un patient ayant plus de 10 g/dl
d’hémoglobine et de ne pas transfuser un patient ayant moins de 6
g/dl. »
Le Dr G. Andreu rappelle aussi que les pratiques françaises depuis au moins 1997 sont proches des propositions « restrictives » des études récentes et que la France est le pays industrialisé où l’utilisation de concentrés de globules rouges par habitant est la plus faible.
Dr Julie Perrot