Soigner la médecine !

Paris, le samedi 26 mars 2016 – Thème peu glamour, la désertification médicale est pourtant en passe de devenir un sujet de cinéma. Il y a deux ans déjà, elle était le cœur du film de Stéphane Meunier, Un Village presque parfait, actuellement diffusé sur les chaînes de Canal +. On y voyait un chirurgien esthétique parisien, souhaitant se refaire une santé, débarquer dans une petite ville de province, abandonnée par son seul médecin. Pour séduire le docteur Meyer (interprété par Lorant Deutsh), les habitants de Saint-Loin-La-Moderne, soucieux d’obtenir une subvention de Bruxelles conditionnée à la présence d’un praticien, vont tout faire pour l’attirer dans son giron. Les facéties déployées emmenées par une brochette d’acteurs assez justes (de Didier Bourdon à Denis Podalydès en passant par Elie Semoun) permettent de passer un moment plaisant, tout en mettant un coup de projecteur sur l’ensemble des conséquences de la désertification médicale, non pas seulement sanitaires, mais également sociales et économiques.

Campagne

Vue ici plus certainement du côté des patients, la désertification médicale est abordée à travers l’angle du praticien dans le très attendu Médecin de campagne de Thomas Litti, sorti sur les écrans cette semaine. Après le très commenté Hippocrate, qui évoquait les premières semaines d’internat d’un jeune praticien, Thomas Litti nous plonge dans le quotidien d’un praticien rural, interprété quasiment à la perfection par François Cluzet. Ici aussi, on constate combien le médecin dans une zone isolée est bien plus qu’un simple professionnel pourvoyeur de soins mais un acteur essentiel pour donner du sens au tissu social. C’est ce que devra apprendre la jeune Nathalie (campée par Marianne Denicourt) venue en renfort soutenir François Cluzet, atteint d’une maladie grave qui l’empêche de poursuivre son activité. La jeune femme va être l’objet d’un tendre bizutage de la part du praticien mais aussi des patients, mais parviendra tout de même à tracer son chemin sur ces routes boueuses. S’il devrait susciter moins de polémiques qu’Hippocrate (dont certains avaient estimé qu’il ne donnait pas une vision juste des soins hospitaliers en France aujourd’hui), Médecin de campagne est cependant une nouvelle fois un portrait touchant, profondément affectueux mais sans complaisance de l’exercice de la médecine. On s’y promène avec bonheur, grâce notamment à la performance des deux acteurs.

En campagne

La désertification médicale n’est cependant sans doute pas l’unique maux de la médecine aujourd’hui. A l’hôpital, une organisation déshumanisée annihile le lien humain. C’est tout au moins le sombre diagnostic dressé par deux praticiens, Anne Révah-Lévy, professeur de pédopsychiatrie, et Laurence Verneuil, professeur de dermatologie, qui dans un livre au titre évocateur Docteur, écoutez ! exhortent à un retour de l’écoute. Dans cet ouvrage, les praticiens dressent le portrait d’hôpitaux où les patients disposent souvent de quelques minutes fragiles pour évoquer leurs questions et interrogations. « L’hôpital est en train de broyer les soignants, y compris les médecins », déplorent les auteurs qui affirment que soigner la médecine est possible ! Car comme le montrent les films de Stéphane Meunier et de Thomas Litti, elle est plus qu’essentielle.

Télévision : Un village presque parfait, de Stéphane Meunier, diffusion sur les chaînes du groupe Canal +, jusqu’au 1er avril

Cinéma : Médecin de campagne, de Thomas Litti, sortie le 23 mars, 1h42

Livre : Docteur, écoutez ! d’Anne Révah-Lévy et Laurence Verneuil, Albin Michel, 162 pages, 13 euros

Aurélie Haroche

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Réagir à cet article

Les réactions sont réservées aux professionnels de santé inscrits et identifiés sur le site.
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.


Lorsque cela est nécessaire et possible, les réactions doivent être référencées (notamment si les données ou les affirmations présentées ne proviennent pas de l’expérience de l’auteur).

JIM se réserve le droit de ne pas mettre en ligne une réaction, en particulier si il juge qu’elle présente un caractère injurieux, diffamatoire ou discriminatoire ou qu’elle peut porter atteinte à l’image du site.