Les militaires dorment en moyenne un peu moins que la population générale, à savoir environ 6,9h par jour. Mais ce sont surtout les soldats en missions qui subissent le plus lourd impact sur leur sommeil, avec un temps de sommeil moyen de 5,8h, pouvant descendre dans certains cas en dessous de 4h par nuit, sans possibilité bien entendu de compensation lors du repos hebdomadaire. On peut identifier très nettement le seuil de 6h de sommeil par jour en dessous duquel sont constatés des effets délétères important sur le système nerveux central, le système endocrinien et immunitaire. On observe alors une altération de la vigilance, une diminution des performances et une augmentation du risque d’accidents. Si l’on prend l’exemple des pilotes, un sommeil inférieur à 6h entraine un risque important de micro-sommeils durant un vol prolongé, avec au moins un épisode de micro-sommeil par vol de longue durée.
La sieste : une activité militaire comme une autre
Quelles sont les contre-mesures mises en place par l’armée ? On apprend tout d’abord aux militaires à mieux gérer leur sommeil, en les incitant par exemple à accorder une importance au choix du lieu de leur repos. Les recommandations sont bien sûr proches de celles délivrées à la population générale : pratiquer une activité sportive, éviter les écrans, et le café le soir. Les consommations de café des militaires sont en effet très importantes (environ 400 mg par jour en moyenne !). Le service de santé des armées recommande aux soldats de ne pas dépasser une consommation de 600 mg. Une seule journée de formation sur l’hygiène de sommeil délivrée à des militaires permet une diminution significative de la somnolence (évaluée à partir du score d’Epworth).Les militaires pratiquent également la technique de « l’extension de sommeil », qui consiste simplement à « imposer », avant une opération, de rester pendant une semaine 10h au lit par jour (ce qui a pour effet d’augmenter le temps de sommeil d’environ 1h). Les sujets qui ont suivi cette préparation bénéficient au cours des opérations d’une nette amélioration de leurs performances mentales et de la tolérance à la restriction du sommeil, avec une diminution du temps de réaction, et quasiment pas de micro-sommeils durant les périodes de privation de sommeil. On observe également une amélioration légère des performances physiques. Les soldats pratiquent également les « siestes optimisées » par les Techniques d’Optimisation du Potentiel (TOP), consistant en des siestes de 30 minutes, induites par suggestion hypnotique, au point que le Dr Sauvet considère la sieste comme une « activité militaire à part entière ».
Retenons donc qu’un temps de sommeil inférieur à 6h est associée à une nette diminution des performances (quid des dirigeants qui prétendent dormir moins de 4h ?). En dehors de la médecine militaire, gageons que ces différents conseils pourraient être utiles à une autre population soumise à des conditions extrêmes de sommeil… A savoir les professionnels de santé, qui s’embarquent parfois pour des gardes durant encore plus longtemps qu’un vol long courrier.
Dr William Hayward