L. Lowe et coll. ont rapporté les observations de trois femmes atteintes de polyarthrite rhumatoïde avec facteur rhumatoïde et qui présentaient des lésions disséminées douloureuses, papuleuses ou plus rarement vésiculeuses, avec parfois formation d'une croûte. La biopsie de ces lésions a montré un infiltrat dermique riche en polynucléaires neutrophiles. Ceux-ci étaient parfois en leucocytoclasie sans dépôt fibrinoïde dans le derme ou dans les vaisseaux. Une dégénérescence basophile du collagène ou des vésiculobulles intra-épidermiques ont été notées sur certains plans de coupe. Ces papules ont évolué sans fièvre, sans hyperleucocytose à la numération formule sanguine, vers une guérison spontanée et les auteurs ont porté le diagnostic de dermatose neutrophilique rhumatoïde.
Celle-ci prédomine sur les épaules, la face d'extension des avant-bras, le dos des mains. Plus rarement le tronc, les paumes ou les plantes sont atteints. Les lésions sont parfois douloureuses mais sans signe systémique. La guérison se fait spontanément.
Avec des neutrophiles mais sans Sweet
L'histologie est caractérisée par la présence d'un infiltrat dermique fait de polynucléaires neutrophiles sans vascularite. Il peut exister une leucocytoclasie et une dégénérescence basophile du collagène. Des bulles intra-épidermiques par spongiose ou sous-épidermiques remplies de polynucléaires neutrophiles, des micro-abcès papillaires sont quelquefois signalés.
Le diagnostic différentiel se fait généralement aisément avec le lupus bulleux, la dermatose à IgA linéaire et la dermatite herpétiforme. L'étude en immunofluorescence cutanée directe permet dans les cas difficiles, d'éliminer ces affections.
Le diagnostic est plus malaisé avec les autres dermatoses neutrophiliques et ce d'autant plus que certaines d'entre elles sont décrites en association avec la polyarthrite rhumatoïde.
La différence paraît ténue
- Le syndrome de Sweet est caractérisé par des plaques ou des nodules durs, douloureux de la face, du tronc et des extrémités. Il existe une fièbre élevée des arthralgies, une hyperleucocytose et la réponse aux corticoïdes est spectaculaire. Une conjonctivite, une épisclérite ou une néphrite sont parfois associées. Le tableau clinique, quand il est aussi typique, est donc bien différent de celui de la dermatose neutrophilique rhumatoïde. L'histologie des deux affections montre cependant de grandes similitudes : même infiltrat important à polynucléaires neutrophiles sans vascularite mais avec, dans le syndrome de Sweet, un dème du derme papillaire important, voire une bulle sous-épidermique. Le syndrome de Sweet est parfois associé à des affections myéloprolifératives ou auto-immunes : polyarthrite rhumatoïde, syndrome de Sjögren, lupus érythémateux et colites ulcéreuses.
- L'Erythema elevatum diutinum est, quant à lui, une dermatose faite de plaques et de nodules d'évolution chronique, brun rouge, situés aux extrémités. Histologiquement, l'infiltrat est riche en polynucléaires neutrophiles parfois en leucocytoclasie mais il s'y associent des lymphocytes, des histiocytes et de rares polynucléaires éosinophiles.
- Le Pyoderma gangrenosum est cliniquement différent avec une ulcération à bords abrupts. A un stade précoce, on note un infiltrat important à polynucléaires neutrophiles situé dans le derme et l'hypoderme. Il peut exister une vascularite. L'association est possible avec des arthrites rhumatoïdes, des colites ulcéreuses, des hépatites chroniques actives. Le syndrome de l'anse borgne peut entraîner des lésions à type de pustules ou de papules purpuriques. On retrouve dans le derme un infiltrat de polynucléaires neutrophiles avec leucocytoclasie. C'est dire encore une fois la similitude histologique avec la dermatose neutrophilique.
L. Lowe et coll. concluent que la dermatose neutrophilique rhumatoïde fait partie du vaste cadre des dermatoses neutrophiliques qui incluent notamment le syndrome de Sweet, le Pyoderma gangrenosum et l'Erythema elevatum diutinum. Ces dermatoses peuvent être elles-mêmes associées à une arthrite rhumatoïde ou une autre maladie immunologique.
Alexiane Dallot
Lowe L. et coll. : "Rhumatoid neutrophili
DALLOT ALEXIANE