Ulcérations buccales de l’enfant : de l’aphte aux maladies systémiques

Des équipes de l’hôpital de Tours se sont attachées à préciser le diagnostic, notamment étiologique, des ulcérations buccales de l’enfant.
Reconnaître l’ulcération

M. Samimi et coll. rappellent les principales caractéristiques cliniques menant au diagnostic d’ulcération de la bouche chez l’enfant. Ils insistent sur l’existence, le plus souvent, avant l’apparition de l’ulcération, de bulles ou de vésicules, sur l’unicité ou la multiplicité des lésions, leur caractère récidivant ou non, ainsi que sur la présence de lésions de localisations autres, muqueuses ou cutanées.

L’ulcération est primitive : l’aphte, les traumatismes, les virus

Première cause d’ulcération buccale de l’enfant, l’aphte, avec une prévalence de récurrence de 40 % en pédiatrie.

Autres situations et affections étiologiques : les traumatismes, avec notamment deux entités décrites chez l’enfant : l’ulcère traumatique du tiers postérieur du palais, par traumatisme lors de la succion (ulcère de Bednar), et « l’ulcération éosinophilique de la muqueuse buccale », à la face ventrale de la langue, satellite de l’éruption des premières incisives mandibulaires (ulcération de Riga Fede).

Enfin, les viroses et les médicaments, sont source d’ulcérations de la bouche chez l’enfant. Parmi les premières, les auteurs relèvent la primo-infection herpétique, l’herpès récurrent, le syndrome pied-mains-bouche, l’herpangine (survenant avant 3 ans, due aux virus Coxsackie), la varicelle et le zona. La première, qui survient à partir de 6 mois, est marquée par une fièvre avec dysphagie, des érosions recouvertes d’un enduit fibrineux, coalescentes en ulcérations polycycliques. Dans la deuxième, les vésicules, groupées en bouquet, évoluent vers des érosions croûteuses. Dans le syndrome pieds-mains-bouche, lié au virus Coxsackie A16 ou à l’Entérovirus 71, qui survient par épidémies saisonnières, il s’agit d’érosions post-vésiculeuses buccales et palmo-plantaires ou digitales.

À cette liste les auteurs ajoutent l’érythème polymorphe, constitué d’érosions post-bulleuses buccales, accompagnées d’une atteinte cutanée, en cocardes, des extrémités. Il est le plus souvent post-infectieux (Herpes, ou infection par virus d’Epstein-Barr ou par Mycoplama pneumoniae), ou d’origine médicamenteuse.

L’ulcération est secondaire : toute une gamme de causes

L’aphtose récurrente idiopathique (au moins trois épisodes annuels), dans sa forme mineure (de 1 à 5 aphtes de moins de 1 cm) guérit sans cicatrice en 7 à 15 jours. Dans sa forme majeure, les aphtes, géants, nécrotiques, persistent des mois cédant la place à des cicatrices fibreuses et mutilantes.

Les aphtoses récurrentes secondaires appellent une enquête étiologique, à la recherche notamment d’affections systémiques, inflammatoires, infectieuses.

Parmi celles-ci figurent : la maladie de Behçet, où les aphtes buccaux inaugurent la maladie dans 80 % des cas, très évocateurs lorsqu’ils s’accompagnent d’ulcérations génitales et périanale ; les maladies inflammatoires chroniques intestinales où aphtes, stomatite, chéilite, gingivite, peu spécifiques, sont fréquents ; l’infection par le VIH, où les ulcérations buccales, récidivantes réalisent une aphtose majeure et appellent la recherche d’infections opportunistes, et d’une leucémie aiguë.

La liste étiologique se poursuit par les carences et déficits en fer, en folate, en vitamine B12, dont le rôle contributif est discuté, qui pourraient être impliquées dans 20 % des cas d’aphtose récidivante. Elle s’achève par la neutropénie cyclique idiopathique, exceptionnelle, se traduisant par une chute des polynucléaires neutrophiles toutes les 3 à 4 semaines, fébrile, avec épisodes infectieux et ulcérations buccales, ainsi que le PFAPA (Periodic Fever Aphthous stomatitis, Pharyngitis, Adenitis) syndrome, décrit chez les moins de 5 ans.

Ainsi, les auteurs mettent l’accent sur deux difficultés diagnostiques :

1) « toute ulcération aiguë de la cavité buccale n’est pas un aphte »,
2) « les ulcérations récurrentes de la cavité buccale de l’enfant correspondent souvent à une aphtose récurrente idiopathique mais peuvent être associées à des pathologies systémiques à rechercher […] ».

Dr Julie Perrot

Référence
Samimi M et coll. : Diagnostic des ulcérations buccales de l’enfant. Congrès de la Société française de pédiatrie (Toulouse) : 10-13 juin 2009.

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