Un peu de neuf dans l’acné

La cession « quoi de neuf en dermato », toujours la plus prisée des JDP, a commencé cette année par un quasi pied de nez : « l’isotrétinoïne a annoncé le Pr Marie Beylot Barry, est un traitement majeur de l’acné, le seul potentiellement curatif. » Dont acte.

Le propos était en fait de mettre fin à certaines controverses dont cette molécule a fait l’objet, soupçonnée en particulier d’induire des troubles psychiatriques et des conduites suicidaires ce qui n’a pas été confirmé à l’échelle populationnelle même si ce n’est pas exclu pour un individu donné. Cependant l’incidence des conduites suicidaires est moindre sous isotrétinoïne (Etude de C Droitcourt en 2019) ce qui suggère que la population psychiatrique est éliminée du champ de la prescription.

Il a été confirmé en 2023 que le délai d’introduction du traitement est plus long en cas d’antécédents psychiatriques selon les données de l’assurance maladie. Parmi les patients prenant de l’isotrétinoïne Kidrin et al. dans le JAAD en 2023 constatent moins de dépression, de syndrome de stress post traumatique, d’anxiété, de troubles bipolaires et de schizophrénie par rapport à ceux sous antibiotiques locaux, le risque suicidaire étant identique. En résumé, il faut être vigilant mais prescrire quand même l’isotrétinoïne pour limiter l’impact psychologique de l’acné.

Autre reproche fait à l’isotrétinoïne, son rôle aggravant ou inducteur de MICI (maladies inflammatoires chroniques de l’intestin). Une étude sur plus de 700 000 patients de M Taylor et al. dans le JAAD en 2023, montre qu’il y a une association significative entre acné et MICI indépendamment du traitement reçu (Odds Ratio 0R 1,42 ; intervalle de confiance à 95 % [IC95 %] 1,23-1,65). Mais si l’on compare des patients avec acné sous isotrétinoïne versus sans isotrétinoïne (77 005 patients dans chaque groupe), on ne retrouve pas de sur risque de MICI lié aux antibiotiques ou à l’isotrétinoïne. Une possible poussée transitoire de RCH dans les 6 premiers mois sous isotrétinoïne a été néanmoins signalée.

D’autres acnés

Sujet d’actualité, le dermatologue doit être averti de la possibilité d’acné chez les personnes trans genres : elle toucherait 1 % de la population dans l’année de la transition en particulier dans les 6 premiers mois et est plus fréquente si la transition est précoce. Elle est parfois sévère, éventuellement associée à un hirsutisme et une alopécie androgénogénétique de survenue plus tardive et dont la prévalence augmente avec le temps. Davantage de pathologies psychiatriques associées sont observées chez les transgenres par rapport aux cisgenres. Il faut savoir manier le vocabulaire dans cette situation, proposer une contraception sous isotrétinoïne pour les transgenres hommes et prolonger le traitement hormonal.

Autre problématique autour de l’acné, les lésions acnéiformes sous traitement par inhibiteur de JAK : 6 à 13 % des patients traités sont concernés, les lésions sont d’apparition rapide et se voient plus fréquemment chez les patients traités pour des indications dermatologiques sans qu’on ait déterminé si cela est lié à un terrain différent ou à un biais de signalement ; les données proviennent d’essais de phase 2-3 et ne sont donc peut-être pas représentatives. L’éruption touche visage et tronc et se voit surtout avec les anti JAK 1-2 et anti TYK2. Ce sont des papules voire des pustules mais pas des lésions rétentionnelles ; ce n’est pas une authentique acné et une prise en charge distincte est requise.  

Post- acné

Au cours de cette présentation consacrée à l’acné M Beylot Barry a également évoqué le « fardeau » représenté par les hyperpigmentations qui suivent les lésions d’acné mais peuvent aussi leur être concomitantes notamment pour les patients aux phototypes foncés. Au total 47 à 87 % des patients sont concernés par ces séquelles qui peuvent persister plusieurs années. (Khelife A et al., Ann Dermatol Venerol 2023). Ces lésions apparaissent très stigmatisantes. Sur 1 000 personnes à qui l’on a montré des photos de patients avec ou sans lésions pigmentées (Schuster B et al., Br J Dermatol., 2023), la plupart « ressentent ces patients » comme maladifs, timides, tristes, lourdauds.

Un argument supplémentaire pour une prise en charge précoce de l’acné notamment sur les phototypes foncés.

Dr Marie-Line Barbet

Référence
Beylot Barry M : Quoi de neuf en clinique. Samedi 9 décembre. JDP 2023. 05-09 décembre 2023.

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