Malgré les progrès réalisés dans la génétique de la narcolepsie,on en sait peu sur l’évolution des individus touchés en termes de morbidité et de mortalité. Deux études présentées au congrès apportent un nouvel éclairage sur leur vulnérabilité.
D’après les résultats d’un suivi par questionnaire de trois cent huit sujets (21 à 84 ans) entre 2005-2007 et fin 2011-début 2012 (1), l’évolution de la narcolepsie est accompagnée de plusieurs problèmes médicaux, mais surtout de troubles mentaux exposant les personnes narcoleptiques à un risque plus élevé de suicide. Les patients ont été interrogés et évalués à l'aide du système expert Sleep-EVAL par des questions sur leur sommeil et leurs pathologies mentales ou organiques. Parmi les 291 qui ont pu terminer l’étude, la pathologie nouvelle la plus fréquemment signalée était l'hypertension artérielle (3,1 %), suivie du diabète (2,6 %) et du cancer (2,2 %). Le taux global de mortalité de l'échantillon de sujets narcoleptiques était comparable à celui de la population générale américaine pendant la même période. Cependant le taux de suicide était 7 fois plus élevé dans l'échantillon narcoleptique (RR [Risque Relatif] = 7,35 ; intervalle de confiance à 95 % de 1,84 à 29,41).
Des entretiens approfondis avec 320 sujets narcoleptiques (système Sleep-EVAL ) ont porté sur le sommeil (habitudes et troubles [Classification Internationale des Troubles du Sommeil - ICSD]), la consommation de médicaments, les problèmes de santé (Classification internationale des maladies – CIM version 10), et sur leurs troubles mentaux (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux DSM-IV-TR)(2). Les réponses ont été comparées à celles de 1 464 sujets contrôles appariés. Les 5 pathologies les plus fréquentes chez les sujets narcoleptiques étaient l’hypercholestérolémie (OR [odds ratio] = 1,51 par rapport aux sujets témoins), puis les maladies digestives (OR = 3,27), les maladies cardiaques (OR = 2,07), celles des voies respiratoires supérieures (OR = 2,52), et l’hypertension artérielle (OR = 1,32). Le trouble dépressif majeur et le trouble d'anxiété sociale étaient les problèmes psychiatriques les plus répandus au sein du groupe narcolepsie, touchant près de 20 % des individus (OR respectivement 2,67 et 2,43).La majeure partie des problèmes d'humeur et d’anxiété sont plus courants chez les narcoleptiques.
La narcolepsie est donc associée à une comorbidité élevée à prendre en compte lors de l'élaboration d'un traitement, conclut Maurice Ohayoun (Stanford University, Palo Alto, CA, Etats-Unis).
Dominique Monnier