
Paris, le mercredi 20 octobre 2021 - C’est sans doute l’autre
facette de l’échec américain en Afghanistan.
Déterminés à éradiquer la culture du pavot, les États-Unis ont
laissé après leur départ un État et un peuple afghan plus que
jamais dépendant de cette drogue et du secteur économique qu’elle
représente.
Pendant plus de vingt ans, les chefs de guerre ont profité de
l’intervention occidentale pour faire du pays un véritable
narco-Etat. En 2020, il comptait ainsi 224 000 hectares de pavot,
soit une hausse de 37% par rapport à 2019, selon l'Office des
Nations unies contre les drogues et le crime (UNODC). Une manne
financière considérable pour les producteurs comme pour les
exploitants agricoles.
10 % de la population toxicomane
Arrivés au pouvoir à la faveur du retrait rapide des forces
américaines, les nouveaux maîtres de Kaboul ont découvert un pays
également touché par les conséquences sanitaires de la
drogue.
Sevrage forcé
Face au problème, les talibans ont fait le choix de mesures
expéditives. A Pul-e-Sukhta, un pont sous lequel la ville recrache
ses eaux usées et où les usagers de drogue se retrouvent, la police
armée s’est livrée à une véritable rafle des toxicomanes conduits
de force dans le service de réhabilitation de l’hôpital Ibn Sina,
installé dans une ancienne base militaire.
Le séjour de "Réhabilitation" de 45 jours s'apparente plutôt à
un sevrage au cours duquel les hommes passent leurs journées
couchées sur leurs lits, dans des chambres collectives ou des
dortoirs, ou accroupis dans les cours. Les visages et les corps
amaigris, les toxicomanes en centre de détention sont revêtus de
tuniques vertes trop grandes pour eux.
Un financement qui fait défaut
"C'est la politique de l’Émirat islamique, ils en arrêtent
davantage. Ils veulent nettoyer la ville de ceux qui
l'enlaidissent. Alors dès que nous avons des places, ils vont les
chercher. Aujourd'hui, nos 1 000 lits sont presque tous
occupés" indique à l’AFP le Dr. Ahmad Zoher Sultani, directeur
du centre.
Économiquement au bord du gouffre, le gouvernement des
talibans ne parvient pas à financer le centre. "Pour l'instant,
nous travaillons gratuitement, personne n'a été payé depuis quatre
mois. Nous espérons que les choses s'arrangent" précise le
directeur.
C.H.