
Le surdiagnostic, détection d’une pathologie qui ne se serait pas manifestée du vivant de la personne, est un sujet de préoccupation sérieux. Non seulement il a des conséquences psychologiques négatives, mais il est responsable de surtraitements et d’une utilisation excessive des ressources médicales. Il fait dans certains pays l’objet d’importants efforts de communication, pour que les patients et le public en comprennent les enjeux.
Au Royaume-Uni, des mesures ont été prises ces dernières années pour améliorer la compréhension par les patients du concept de surdiagnostic et de ses conséquences, notamment pour le cancer du sein et de la prostate. Il s’agit en effet d’une notion parfois difficile à appréhender car souvent considérée comme contre-intuitive, du fait qu’elle vient en contradiction totale avec la « croyance » bien établie de l’importance d’un dépistage précoce.
Moins de la moitié des personnes interrogées à ce sujet estiment que le concept est clair
Ces efforts d’information atteignent-ils leur but ? C’est ce qu’a voulu évaluer une équipe londonienne, en interrogeant plus de 1 600 personnes auxquelles était présentée une information écrite sur le surdiagnostic du cancer du sein ou de la prostate. Cette enquête confirme les difficultés à faire « passer le message ». Moins de la moitié des personnes interrogées estiment en effet que le concept est clair. La compréhension semble toutefois meilleure en ce qui concerne le surdiagnostic de cancer du sein que celui de prostate (46,8 % vs 38,4 %).
Des améliorations doivent donc être apportées à l’information délivrée. Pour repérer les pistes possibles d’amélioration, les auteurs ont tenté d’identifier les éléments qui accompagnent une bonne compréhension du concept. C’est ainsi qu’il est apparu que les personnes qui avaient déjà reçu une information sur le sujet sont plus à même de la comprendre…(Odds Ratio [OR] 1,77 ; intervalle de confiance à 95 % 1,40 à 2,33), ou encore ceux qui à qui avait été adressé un dépliant expliquant le concept dans le cadre d’un dépistage systématique (OR 1,35 ; IC 1,04 à 1,74). Cela laisse penser qu’il est nécessaire de renouveler plusieurs fois l’explication de la notion de surdiagnostic, si possible à destination de personnes concernées.
Renouveler l’’information et l’individualiser
Cela risque toutefois de ne pas suffire. En effet, l’enquête montre aussi qu’un autre élément semble associé à la bonne compréhension de la notion de surdiagnostic, et que l’information devrait être individualisée. En effet, les personnes qui ont l’habitude de prendre des décisions « rationnelles » appréhendent mieux le concept que celles qui disent ne pas aimer prendre de décision, ou avoir besoin de prendre l’avis de quelqu’un d’autre ou encore ceux qui prennent leurs décisions de façon « intuitive » (« je prends généralement les décisions que je sens bonnes pour moi »). Et cela, indépendamment du niveau d’éducation.
Les auteurs donnent quelques pistes pour améliorer la communication sur le surdiagnostic. Ils préconisent notamment des descriptions différentes de cas de surdiagnostics, pour adapter et rendre le concept plus parlant selon la personnalité du patient et son mode de prise de décision. Il s’agit là d’un challenge important pour que le concept de décision éclairée ne reste pas au stade du vœu pieux.
Dr Roseline Péluchon