
Austin, le mardi 15 mars 2022 – Les autorités du Texas veulent interdire les traitements hormonaux des adolescents transsexuels, relançant le débat sur la transidentité outre-Atlantique.
C’est un des éléments de la « bataille culturelle » qui oppose républicains et démocrates depuis plusieurs décennies et qui creuse toujours un peu plus le fossé entre l’Amérique profonde et les « progressistes ». Depuis plusieurs années, les Américains s’écharpent sur la manière de considérer les transsexuels alors que la transidentité semble, même si des chiffres précis sont difficiles à obtenir, un phénomène de plus en plus fréquent, notamment chez les jeunes. D’un côté les démocrates progressistes, qui souhaitent l’inclusion la plus totale des transsexuels et voient dans le changement de sexe un nouveau droit fondamental, de l’autre les républicains conservateurs qui voient dans la transidentité une atteinte au mode de vie américain et chrétien.
Polémique politique et bataille judiciaire
Si ces dernières années, le débat a pu se centrer sur la question assez anecdotique des toilettes sexuées, la problématique des traitements hormonaux administrés aux enfants et adolescents souffrants d’une dysphorie de genre est autrement plus épineuse. Dans l’Etat très conservateur du Texas, le gouverneur républicain Gregg Abbot a demandé à son administration, par un courrier officiel en date du 22 février, de mener une enquête sur tous les médecins et établissements de santé délivrant des traitements bloqueurs de puberté aux adolescents transgenres, ainsi sur que les familles de ces enfants. En conséquence, l’hôpital pédiatrique de Houston a annoncé « faire une pause » dans la prise en charge des adolescents transgenres « pour protéger les professionnels de santé et les familles d’éventuels poursuites criminelles ».
Une véritable chasse aux sorcières qui a créé la polémique au Texas et au-delà dans l’ensemble des Etats-Unis. Le Président des Etats-Unis a ainsi dénoncé les « actions discriminatoires » des autorités texanes qui « mettent la vie des enfants en danger ». Comme souvent en Amérique, la polémique politique se double d’une bataille judiciaire. Des familles qui ont fait l’objet d’une enquête par les services de protection de l’enfance ont saisi la justice. Vendredi dernier, un juge d’Austin, la capitale du Texas, a suspendu la directive du gouverneur, estimant qu’il n’avait pas le pouvoir d’enquête sur des traitements qui ne sont pas interdits par la loi. Mais le ministre de la justice du Texas a annoncé sa volonté de faire appel de sa décision et de saisir la Cour Suprême du Texas.
Ne pas céder aux sirènes du militantisme
Si la décision brutale du gouverneur du Texas est sans doute condamnable, le fait d’offrir des traitements de transition sexuelle, y compris chirurgicaux, à des enfants et des adolescents, est discuté. Sans vouloir nier la détresse de ces jeunes hommes et femmes qui se sentent bloqués dans un sexe qui n’est pas le leur, on peut douter de la capacité d’enfants de 12 ans à consentir à des traitements lourds et parfois irréversibles.
Selon certains psychiatres américains opposés à ces thérapies, la plupart des adolescents supposément transgenres finissent par surmonter leur dysmorphie et à accepter leur sexe biologique une fois la puberté passée (mais les chiffres sont difficiles à vérifier). Plusieurs cas d’adolescents ayant subi des opérations de réassignation sexuelle et qui regrettent leurs choix par la suite ont été documentés. Sans parler de « phénomène de mode », terme plus que maladroit en la matière, il est par ailleurs probable qu’il existe une « contagion sociale », selon les termes de la journaliste américaine Abigail Shrier, qui pousse de plus en plus d’adolescentes à se déclarer transgenres sans l’être réellement.
Malheureusement, le débat scientifique et éthique indispensable sur la question est pris en otage par des conflits politiques caricaturaux qui ne laissent pas de place à la nuance. Car face à la transphobie et à l’intolérance, se dresse souvent un discours militant et intransigeant, qui refuse tout débat sur la question. Certains militants LGBT ont ainsi appelé à brûler le livre d’Abigail Shrier « Dommage Irréversible », qui met en lumière les excès des thérapies de réassignation sexuelle. Dans cette opposition stérile, les médecins doivent se rappeler qu’ils ne sont pas des militants et toujours garder en tête l’intérêt supérieur du patient.
Quentin Haroche