Cancer du pancréas, état actuel des connaissances

Les chirurgiens sont, tout au long de leur carrière, d’éternels étudiants, et doivent s’adapter aux progrès de leur art. Aussi cette mise au point sur le cancer du pancréas (KP) s’adresse-t-elle autant aux vétérans qu’aux futurs spécialistes. Les auteurs européens ont ambitionné de présenter un état des lieux sur ce thème en 2023.

Facteurs de risque et signes précoces

Moins fréquent que d’autres cancers digestifs même si son incidence mondiale augmente, sa lourde létalité en fait une des premières causes de décès par cancer. Ses facteurs de risque sont l’âge avancé, le tabac, l’alcool, l’obésité, la pancréatite chronique, mais aussi des facteurs génétiques (mutation des gènes BRCA1/2) ou une association au cancer du côlon héréditaire sans polypose (HNPCC, syndrome de Lynch). Les mutations jouent un rôle dans le diagnostic du KP depuis que l’on sait faire des analyses à haut débit de l’acide désoxyribonucléique (ADN).

La survenue brutale d’un diabète est un signe d’alerte précoce même si les recommandations en matière de dépistage ne sont pas claires. Les kystes du pancréas se sont révélés pouvoir être des lésions précancéreuses, particulièrement les kystes mucineux, conduisant à une surveillance accrue et un traitement plus agressif de ces lésions.

Pathobiologie et classification

Les connaissances de base sur la carcinogenèse pancréatique incluent l'importante voie RAS, y compris les mutations de KRAS (trouvées dans plus de 95 % de tous les cancers du pancréas).

La stadification des KP intègre des critères radiologiques, biologiques (biomarqueurs tumoraux) et anatomopathologiques ; elle prévaut sur la classification TNM classique, car l’importance de l’atteinte des ganglions et des organes de voisinage influe sur les indications thérapeutiques. Les critères de la classification NCCN (National Comprehensive Cancer Network), actuellement la plus utilisée, permettent de définir la résécabilité de la tumeur.

Arsenal thérapeutique

Que le KP soit résécable ou non, un traitement multimodal est envisageable dans l’objectif d’une survie optimale. Actuellement, une chimiothérapie néoadjuvante (CNA) est proposée avant la chirurgie, en particulier dans le KP limite et localement avancé. S’il existe un ictère par rétention, on pratiquera une cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique avant de mettre en place la prothèse biliaire et l’écho-endoscopie sera l’occasion de pratiquer des biopsies pancréatiques car un diagnostic histopathologique est nécessaire avant une CNA. Une CNA a pu rendre résécables certains KP qui ne l’étaient pas initialement.

Une chimiothérapie postopératoire adjuvante est systématique ; le FOLFIRINOX modifié (acide folinique, 5-fluorouracile, irinotécan, sels de platine) est actuellement préférée à la classique gemcitabine.

Les soins péri-opératoires ont bénéficié de l’hyper-alimentation protidique et de supplémentations en sucs pancréatiques.

La chirurgie elle-même, qu’il s’agisse de duodénopancréatectomie céphalique, incluant parfois une résection partielle du tronc porte, d’une pancréatectomie distale, ou totale, avec curage, a bénéficié des progrès de la chirurgie (préservation du pylore) et de la réanimation, et de la meilleure connaissance des traitements des complications de ces techniques (fistules anastomotiques, hémorragies, retard de vidange gastrique, voire pancréatite aiguë postopératoire).

A long terme, il faudra surveiller et traiter l’apparition d’un diabète ou d’une insuffisance pancréatique exocrine chez les survivants.

Dr Jean-Fred Warlin

Référence
Søreide K, et al. Pancreatic cancer. Eur J Surg Oncol. 2023 Feb;49(2):521-525. doi: 10.1016/j.ejso.2023.01.001.

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