
Paris, le samedi 5 décembre 2015 – A quoi jouent les enfants dans les pays en guerre ? « Tout est touché par la guerre : les enfants ont un jeu qui s’appelle "Un, deux, trois, Bombe" où ils se jettent à terre » raconte au Guardian Karline Kleijer, coordinatrice d’urgence pour Médecins sans frontières (MSF). Plus tard, elle évoque « quatre garçons, âgés de neuf ou dix ans, dont deux frères. Ils jouaient avec des munitions non explosées ». Où s’amusent aussi tragiquement ces enfants (deux des petits garçons ont été grièvement blessés) ? En Syrie ? Dans un pays d’Afrique subsaharienne ? Au Yémen.
16 000 blessés de guerre soignés par MSF
Loin des médias, la guerre civile yéménite, dont les prémices datent de juin 2014, s’est muée en conflit international avec au printemps 2015 l’entrée en action d’une coalition emmenée par l’Arabie saoudite et qui bénéficie du soutien des Etats-Unis, de la France et du Royaume-Uni. Les bombardements pleuvent ainsi sur le pays depuis des semaines. Le conflit a des conséquences inévitables sur les conditions sanitaires, qui sont particulièrement visibles dans la ville de Taïz où selon Karline Kleijer, la situation est « terrible ». Cette ville de 600 000 habitants comptait avant la guerre vingt hôpitaux, « mais quatorze d’entre eux ont dû fermer parce qu’ils ont été endommagés par les frappes aériennes et les bombardements ou qu’ils n’ont plus de médicaments, de carburant et de personnel médical ». Dès lors, le soutien de Médecins sans frontières (MSF) est essentiel. Ainsi, au sein des huit provinces yéménites, « les équipes de MSF ont traité plus de 16 000 blessés de guerre. Le système de santé étant très affecté par la guerre, MSF fournit également des soins non urgents » précise l’organisation.
Un hôpital pourtant connu des forces de la coalition pris pour cible
Cependant, à Taïz notamment, cette activité est quotidiennement mise en péril par les bombardements ; les hôpitaux n’étant pas épargnés. Ainsi, le 27 octobre, un établissement qui recevait un soutien actif de MSF a été détruit par les frappes de la coalition saoudienne à Haydan. Ce 2 décembre, c’est une clinique installée par l’organisation à Taïz qui a été frappée, faisant neuf blessés. Les représentants de MSF s’indignent contre ce nouveau viol de la neutralité des équipes de santé. « Le bombardement d’hôpitaux et de civils est une violation du Droit Humanitaire International. Les civils venant se faire soigner dans des structures médicales doivent être protégées » remarque Jérôme Alin, chef de mission MSF au Yémen, qui rappelle que « Les coordonnées GPS des structures médicales étaient régulièrement partagées avec les forces de la coalition (…). Il est impossible que la coalition puisse avoir ignoré que MSF menait des activités à cet endroit ». Les circonstances de cette attaque rappellent les dommages subis récemment part un hôpital de l’organisation en Afghanistan .
Partout dans le monde, la protection des organisations humanitaires semble de plus en plus fragile.
Aurélie Haroche